Même s'il se dit ouvert à des bonifications du projet de loi 25, le ministre de la Justice Jean-Marc Fournier reste inflexible sur son principe central: il faut interdire la revente de billets de spectacle à un prix supérieur au prix original.

«Le revendeur plaide le droit de scalper, mais je ne pense pas que ça existe au Québec», a-t-il lancé. Le Parti québécois l'appuie. «Ces spéculateurs diminuent artificiellement l'offre. Le projet de loi veut empêcher cela, et l'intention est tout à fait louable», renchérit le péquiste Yves-François Blanchet, ancien président de l'ADISQ.

Mais M. Blanchet craint que la loi ne réussisse pas à atteindre son objectif. «Il est fort possible que les revendeurs déménagent leur entreprise à Burlington ou ailleurs aux États-Unis et contournent la loi», avance-t-il.

Le gouvernement fera bientôt l'étude détaillée du projet de loi, qui compte un seul article. Il pourrait toutefois grossir. «Je ne suis fermé à aucune mesure qui permettrait au consommateur d'être dans une meilleure situation», a souligné M. Fournier.

Il reconnaît «une vertu» aux revendeurs comme Billets.ca et 514-Billets. Ceux qui ne peuvent pas assister à un spectacle peuvent vendre leur billet à ces courtiers, qui se chargent ensuite de le revendre. Cette protection encourage les gens à acheter des billets pour un spectacle qui se déroulera plusieurs mois après sa mise en vente. Car, contrairement aux revendeurs, les promoteurs n'offrent pas de remboursement.

Un groupe formé de l'ADISQ, Juste pour rire, Spectra, RIDEAU et l'Impact de Montréal a demandé lundi au ministre d'adopter la loi sans modification. Mais au terme des consultations, hier, il s'est dit ouvert à le bonifier pour encadrer de telles collaborations entre les marchés primaire et secondaire. «Peut-être qu'il y aurait une possibilité pour les revendeurs de faire une association avec les producteurs», a-t-il commenté.

Il reste que les revendeurs empochent la majorité de leurs revenus grâce à une autre activité: ils achètent eux-mêmes les billets sur le marché primaire et les revendent ensuite à un prix plus élevé. «Ça n'a aucune utilité pour le consommateur, dit le ministre Fournier. Si leurs clients n'avaient pas acheté les billets aux revendeurs, ils les auraient achetés au marché primaire.»

«À cause de cette spéculation, on fait seulement en sorte que certains spectateurs paient plus cher leur billet», ajoute M. Blanchet.

Le ministre n'a pas ouvert la porte à un encadrement de la revente à un prix supérieur. Billets.ca avait demandé de le permettre à certaines conditions. Parmi elles: interdire l'achat massif de billets en ligne avec un logiciel robot et s'afficher clairement comme revendeurs afin d'éviter toute confusion avec les vendeurs de premier niveau.

Me Julius Grey, avocat d'un groupe de revendeurs, a plaidé en commission parlementaire que la loi ne ferait que déplacer la revente vers le marché noir. L'État perdrait ainsi plusieurs millions en recette fiscale. Me Grey menace de contester la loi dès son adoption.