Quarante grands chanteurs et cantatrices, des changements de décors constants, des ovations debout et l'enthousiasme de spectateurs qui avaient déboursé 3000 dollars pour être là: le Metropolitan Opera de New York a fêté dimanche ses 50 ans au Lincoln Center.

La salle de 3800 places aux plafonds chargés d'or, avec ses énormes lustres et ses fresques signées Marc Chagall, était pleine pour ce concert de gala marquant le 50e anniversaire non pas de la naissance du «Met», vieux de 134 ans, mais de la première saison qui suivit son déménagement au Lincoln Center.

Cette première saison, ouverte par Antony and Cleopatra, du compositeur américain Samuel Barber, avec la légendaire soprano Leontyne Price, avait vu défiler entre autres le ténor italien Franco Corelli, la soprano suédoise Birgit Nilsson ou la cantatrice australienne Joan Sutherland. Deux ans plus tard, le ténor italien Luciano Pavarotti faisait sa première apparition au Met dans La Bohème.

Dimanche soir, ils étaient quarante grands noms de l'opéra, de l'Espagnol Placido Domingo à la très populaire soprano Renee Fleming, pour célébrer cet anniversaire.

Avec en invité surprise le baryton russe Dmitri Hvorostovsky, atteint d'une tumeur au cerveau et qui a abandonné la scène l'an dernier, que le public a salué par une ovation debout.

Malgré son apparence fragile et sa démarche un peu hésitante, il a retrouvé toute son énergie pour chanter un air de Rigoletto, de Giuseppe Verdi, qui lui a valu une deuxième ovation.

Le reste du gala a été une succession d'arias ou de duos des plus célèbres opéras, chacun de ces chanteurs habitués à interpréter un opéra entier se contentant d'un ou deux airs.

«Des paris sur l'avenir»

Un spectacle de cinq heures qui passait allègrement d'un genre à l'autre et d'un opéra au suivant, à chaque fois accompagné d'un décor idoine, souvent avec l'aide de la vidéo.

Vidéo également pour montrer de temps à autres - le temps d'un changement de décor - des images de la première soirée en 1966, ou des plus grands moments de ces cinquante années d'opéra. Ou encore comment les lustres originaux de la grande salle ont été «inventés» par... des éclaboussures involontaires de peinture sur un dessin de l'architecte Tadeusz Leski.

Cet anniversaire arrive pour le Met à un moment difficile pour l'opéra en général aux États-Unis, avec des recettes en baisse et un public vieillissant qu'il peine à remplacer.

Et certaines parties du spectacle de dimanche étaient également des paris sur l'avenir. Avec des aperçus de la saison à venir, mais aussi l'apparition de nouveaux chanteurs, pour montrer que la relève est assurée.

Ainsi la soprano sud-africaine Pretty Yende a chanté avec le baryton polonais Mariusz Kwiecien, un joli duo tiré de Don Pascuale, de Donizetti, et avec le baryton-basse Eric Owens un extrait de Porgy & Bess - deux des programmations à venir du Met.

Et deux vedettes montantes parmi les chanteurs américains, la soprano Angela Meade et le ténor Michael Fabiano, ont accompagné la basse autrichienne Gunther Groissbock dans un air de I Lombardi, de Verdi.

Le gala a aussi célébré des artistes en fin de carrière, comme le chef d'orchestre et directeur musical honoraire James Levine, qui quittera bientôt le Met après 40 ans, le seul de la soirée avec Hvorostovsky à avoir eu l'honneur d'une ovation debout.

Levine a dirigé l'orchestre pour la dernière partie de la soirée, avec notamment Placido Domingo et Renee Fleming dans un duo tiré de Thaïs, de Massenet, avant de conclure sur les choeurs d'Aïda, accompagnés d'un défilé de photos des plus grandes stars ayant chanté sur la scène du Met.