Au terme de l'été 2018, Angèle Dubeau cessera définitivement de tourner. La célèbre violoniste montréalaise compte toutefois boucler la boucle par une longue série de concerts avec son ensemble La Pietà qui la mènera au Canada, aux États-Unis et en Europe.

La part québécoise de cette tournée mondiale intitulée Pour une dernière fois est prévue dès septembre, et culminera à la Maison symphonique les 1er et 2 décembre.

«Ce n'est pas une décision qui relève de ma santé, je vais très bien! J'arrive d'ailleurs d'un voyage en ski à Zürs, en Autriche. La fille qui dévalait les pentes n'avait rien de malade!», assure-t-elle d'entrée de jeu, expliquant que cette décision tient plutôt d'un choix de vie.

«Ça fait quatre décennies que je tourne au pays ou à l'étranger. Que des gros chiffres cette année, d'ailleurs: 50 ans de violon, 40 ans de carrière, 20 ans de Pietà. Cette discipline quotidienne de la tournée est comparable à celle d'athlètes.» 

Après tout ce temps à avoir ratissé la planète, à raison d'une cinquantaine de concerts par an, les exigences de la tournée ne convenaient plus à Angèle Dubeau, qui aura 55 ans en 2017.

«Il n'y a pas d'excuses sur une scène. Chaque soir, je dois performer, être dure avec moi-même, me juger plus sévèrement que quiconque. Et puis... tu te lèves tôt le lendemain, tu manges en vitesse, tu te rends à la prochaine destination et tu t'installes à l'hôtel suivant avant de grignoter quelque chose et de repartir en promo... et puis te préparer, répéter, t'habiller, te maquiller, te rendre à la salle de concert pour les tests. Après le concert, tu rencontres les gens, tu manges ce que tu peux, car la plupart des restaurants sont fermés. Tu vas dormir et ça recommence.»

On comprendra que les tournées exigent une discipline de fer des musiciens classiques. «Je ne peux pas me permettre de loisirs, de sorties ou quelque relâchement. Je ne peux mettre en danger une performance. J'ai quand même dû jouer parfois avec de la fièvre, des otites chroniques ou encore avec des soucis familiaux en tête. J'ai même joué le soir du décès de mon père et les jours suivant sa mort. Lorsque j'ai été atteinte du cancer en 2013, mes concerts ont été reportés plutôt qu'annulés.»

Pas un adieu

Angèle Dubeau affirme en outre que cette tournée d'adieu ne met aucunement un terme à sa carrière. «Du plus profond de moi, je sens que j'ai encore à faire et à dire avec mon instrument. J'ai encore plein plein de projets en tête.»

À ce titre, la musicienne est absolument certaine que son jeu ne souffrira point de cette baisse de régime. «Je vais continuer à m'entraîner quotidiennement, ce qui pour moi sera un luxe et un grand plaisir, car il n'y aura pas d'urgence.» 

«Depuis toute petite, j'ai travaillé trop fort pour admettre un déclin technique. Aujourd'hui, je me sens en pleine possession de mon art, je n'ai aucune raison d'arrêter de jouer. Le jour où je sentirai ne plus être ce que j'ai été, je saurai m'arrêter.»

Rappelons que son plus récent album, Silence on joue - Prise 2, se trouve au pinacle du palmarès canadien de la musique classique. Depuis ses débuts, Angèle Dubeau a vendu plus de 600 000 albums et compte au-delà de 35 millions de streams répartis dans une centaine de pays.

Jusqu'à 2018, donc, son ensemble à cordes La Pietà sera l'employeur principal de ses interprètes féminines, après quoi il sera mis à contribution pour des projets spéciaux. Déjà, un album consacré au compositeur post-minimaliste Max Richter sera enregistré en mai.

Angèle Dubeau continuera en outre d'assurer la direction artistique de la Fête de la Musique de Tremblant, tenue annuellement en septembre. Elle voudra aussi se consacrer davantage à la relève et mener à bien un projet d'éducation musicale qu'elle rendra public en temps et lieu.