C'était jour de fête, jeudi, pour la mécène Jacqueline Desmarais. L'annonce de la nomination de son protégé Yannick Nézet-Séguin au poste de directeur musical du Metropolitan Opera de New York représente à ses yeux l'ultime consécration de la carrière déjà exceptionnelle du chef de 41 ans.

Jointe au téléphone jeudi à sa résidence montréalaise, Mme Desmarais s'est réjouie de constater l'élan d'enthousiasme qu'a provoqué la nouvelle tant dans le milieu musical qu'auprès du grand public. Son « jeune prodige », son « petit Yannick », comme elle l'appelle affectueusement, Mme Desmarais l'aime et le soutient depuis longtemps : depuis 1999 exactement.

« Je l'ai connu alors qu'il n'avait que 24 ans. J'ai tout de suite su que ce jeune musicien charismatique ferait une brillante carrière », a dit Jacqueline Desmarais à propos de Yannick Nézet-Séguin.

« Il n'est pas le seul. Je ne veux pas oublier Stéphane [Tétreault] et mes autres protégés. Mais aujourd'hui, c'est la journée de Yannick », indique la veuve de l'honorable Paul Desmarais C.P., C.C., ex-PDG de Power Corporation du Canada, propriétaire de La Presse.

Jeudi matin, Jacqueline Desmarais a pu enfin exprimer sa joie, son « extase » ainsi que plusieurs émotions qu'elle retenait depuis une semaine. « Peter Gelb [directeur général du Met] m'avait prévenue. Mais je ne pouvais pas en parler à personne. Pas même à Yannick... »

Rappelons que Mme Desmarais est membre du C.A. de l'institution new-yorkaise. Elle a également commandité de nombreux opéras du Met, dont une production de Carmen dirigée par Nézet-Séguin le 31 décembre 2009 - son premier comme chef invité du Met. « Ça demeure l'un de mes plus beaux souvenirs de concerts », avance cette passionnée d'opéra.

PAS UN GROS EGO

Quelles sont les qualités du prodige qui risque de laisser sa marque à New York au cours des prochains décennies ? Mme Desmarais loue son humilité. 

« À travers le monde, vous n'entendrez jamais un musicien parler en mal de Yannick. Tous les gens succombent à son charme, à son intelligence, à sa générosité. Il a un grand coeur », note-t-elle.

Selon elle, Nézet-Séguin est capable de leadership sans imposer son autorité ni terroriser les membres des orchestres qu'il dirige. Il n'est pas snob ni égocentrique. « Mais il a une vision, dit-elle. Regardez ce qu'il a fait avec l'Orchestre Métropolitain de Montréal. Avec sa direction, l'OM est devenu un ensemble de prestige. »

Pour Jacqueline Desmarais, la nomination du chef montréalais au Met représente rien de moins que « l'apothéose de [s]a carrière de mécène ». « Je suis très fière : Yannick va diriger l'orchestre le plus prestigieux au monde - celui du Met -, en plus de celui de Philadelphie. Il sera donc à la tête des deux plus importants orchestres en Amérique du Nord ! »