À New York pour le deuxième concert de leur tournée américaine, les musiciens de l'Orchestre symphonique de Montréal (OSM) offraient un programme unique à la Grosse Pomme, hier soir. Pour l'occasion, le chef d'orchestre a voulu «prendre des risques». Des risques qui ont été vivement applaudis par le public du Carnegie Hall.

Débarqués à New York au beau milieu de la nuit, après plus de quatre heures d'autocar depuis Washington, où ils avaient livré une performance la veille, les quelque 120 musiciens de l'OSM n'ont guère eu le temps de jouer aux touristes en arrivant à Manhattan.

Une courte nuit de sommeil et une petite pause plus tard, ils étaient de nouveau sur scène pour répéter le programme unique à New York qu'ils allaient interpréter quelques heures plus tard.

«Quand on sera plus avancés dans la tournée, on aura un peu plus de temps pour relaxer, mais là, on vient tout juste de commencer et on joue au Carnegie Hall, une des salles les plus prestigieuses au monde», a précisé Richard Roberts, premier violon au sein de l'orchestre.

Originaire du Minnesota, le violoniste se souvient d'avoir joué pour la première fois au Carnegie Hall en 1968. À voir son enthousiasme, il semble que l'excitation ne disparaisse pas avec les années et les répétitions. «Il n'y a sans doute que trois ou quatre salles comme celle-ci dans le monde», selon lui.

Un point de vue partagé par son chef d'orchestre. «On adore tous la Maison symphonique, mais c'est différent», a précisé Kent Nagano quelques minutes après la performance new-yorkaise.

«Carnegie Hall est une des plus grandes salles au monde, cela donne de l'inspiration. On veut essayer, on veut risquer des choses que l'on n'a jamais pensées avant parce que l'on entend autre chose, ici.»

Le chef d'orchestre soutenait avoir dirigé une version extrême du Sacre du printemps de Stravinski. «On a joué Le sacre le plus varié, le plus nuancé que l'on peut oser», a-t-il précisé.

Malgré la proximité, c'est la première fois que l'OSM jouait au Carnegie Hall depuis 2011. À l'époque, l'orchestre avait interprété un programme comprenant des pièces de Gabrieli, Bach, Webern, Stravinski et Beethoven.

Hier soir, l'OSM a présenté La valse de Ravel, le Concerto pour piano no 3 de Beethoven et Le sacre du printemps de Stravinski. «Un programme éclatant et haut en couleur», a précisé Richard Roberts.

Avant le concert, le vénéré magazine New Yorker a décrit le programme comme étant quelque peu «tape-à-oeil» (splashy), mais a louangé «l'élégant et déterminé orchestre québécois» et la soliste «extraordinaire» Maria João Pires.

New York est la seule ville de la tournée américaine où le jeune pianiste Daniil Trifonov a laissé son banc à la soliste portugaise et où l'orchestre a délaissé Prokofiev au profit de Beethoven.

Visiblement très appréciée à New York, où elle se produit rarement (sa dernière visite remonterait à 2011), la soliste a été vivement ovationnée et a même offert un rappel en solo: Bagatelle no 5 de Beethoven.

Pas en reste, l'orchestre a également suscité de très vifs applaudissements pour La valse de Ravel et une ovation debout d'une large partie du public avec sa version «risquée» du Sacre du printemps.

Généreux, l'orchestre montréalais a offert deux rappels: Prélude à l'après-midi d'un faune de Debussy et La farandole de Bizet.

Pour résumer sa programmation, le chef d'orchestre explique avoir «voulu provoquer» en offrant des pièces qui datent d'une période charnière, d'une période de transition, autour de la Première Guerre mondiale. Sans s'engager sur le terrain politique, le chef d'orchestre d'origine américaine croit que les États-Unis vivent actuellement une de ces «périodes de transition».