À ses dons de technicien, de registrateur et de musicien s'ajoute, chez Dominique Joubert, une qualité rare: la densité. En fait de programme substantiel et varié et d'interprétation toujours sentie, l'organiste titulaire de la Cathédrale de Valence, invité à la série estivale de la Basilique Notre-Dame, a offert, en une heure exactement et sans pause, une expérience qui requiert parfois jusqu'à deux fois ce temps.

M. Joubert ouvrait son récital avec deux Messiaen de jeunesse: Apparition de l'Église éternelle et, ajouté au dernier moment, Le Banquet céleste. Pour l'Apparition, il avait choisi la version originale de 1932 plutôt que la révision courante de 1985, registrée différemment.

Les deux pièces découvrent un débutant en orgue et en composition recourant déjà aux formules faciles qui feront son succès - principalement, ces gros accords dissonants tenus outre mesure et semblant ne mener nulle part. Peu importe: M. Joubert joua le plein jeu (sans jeu de mots!) et, passant de un à cinq «forte», produisit dans l'Apparition des crescendos proprements terrifiants.

De Bach, et pour l'anniversaire de la mort (un 28 juillet), il choisit le gigantesque Prélude et Fugue en si mineur, BWV 544, intercalant un choral entre les deux volets, comme cela se fait de plus en plus. Dans le cas présent: un choral non classé, Erbarm' dich mein, o Herre Gott, BWV 721. Traduction: Aie pitié de moi, ô Seigneur Dieu.

Groupant de beaux timbres du positif pour le cantus firmus, mais pris un peu vite, le morceau n'ajoutait rien au diptyque, pleinement satisfaisant comme tel. En effet, M. Joubert registre Bach très sobrement et le lit avec une parfaite clarté polyphonique. C'est un Bach moderne. Quelques petites erreurs vers la fin. La chaleur, sans doute. Rien de grave.

Troisième point fort, en fin de récital: une improvisation de 15 minutes sur le Victimae paschali conjuguant magistralement les transformations du thème et les pleines ressources du vaste Casavant de Notre-Dame.

Précédemment, l'organiste de 59 ans avait tiré le maximum de l'instrument dans les Acclamations qui couronnent la Suite médiévale de 1947 de Jean Langlais et en avait fait chanter les anches dans la Berceuse à la mémoire de Louis Vierne, pièce qu'il avait jouée à l'Oratoire Saint-Joseph en 2003.

Ce vieil ami du Québec retournera d'ailleurs là-haut dimanche prochain, 15 h 30, pour un récital constitué d'improvisations sur des chansons de Félix Leclerc.

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DOMINIQUE JOUBERT, organiste. Dimanche soir, Basilique Notre-Dame (orgue à traction électropneumatique Casavant (1890-1991); 92 jeux, quatre claviers manuels et pédale).