Le rideau est tombé mardi sur le New York City Opera, le deuxième Opéra de New York, qui a annoncé son dépôt de bilan 70 ans après sa création, faute d'avoir pu financer sa nouvelle saison.

«New York City Opera n'a pas atteint son objectif» de recueillir sept millions de dollars avant lundi soir, a expliqué une porte-parole Risa Heller, ajoutant dans un communiqué que le conseil d'administration allait entamer les démarches administratives et financières nécessaires pour fermer.

Le New York City Opera avait lancé en septembre une collecte de fonds de sept millions de dollars, pour financer sa saison 2013-2014. Son directeur artistique George Steel avait alors précisé qu'il voulait 13 millions supplémentaires d'ici à la fin de l'année, pour financer les saisons suivantes.

La collecte a récolté quelque deux millions de dollars, loin de l'objectif initial.

Le New York City Opera (NYCO), surnommé l'«Opéra du peuple» par le maire de l'époque Fiorello La Guardia, était né en 1943 --avec une première production en 1944-- avec pour objectif de rendre l'opéra acccessible au plus grand nombre, grâce à des prix raisonnables,d'être une rampe de lancement pour les nouveaux chanteurs d'Opéra, et de permettre des productions audacieuses.

Le prix des tickets commençait, encore cette année, à 25 dollars, et près de deux tiers des chanteurs annoncés pour la saison 2013-2014 devaient faire leurs débuts à New York.

Mais le NYCO était confronté depuis plusieurs années à de graves difficultés financières, en raison d'une baisse très nette des contributions, et selon ses détracteurs d'une suite de décisions malheureuses.

Depuis trois ans, il avait réduit sa production --seulement quatre opéras étaient au programme cette année, comme l'an dernier-- et quitté en 2010 le Lincoln Center où il s'était installé en 1966. Les musiciens avaient accepté l'an dernier d'importantes baisses de salaire, et l'Opéra avait même vendu aux enchères la plupart de ses costumes.

Des musiciens en larmes

Certains espéraient une intervention de dernière minute du maire de New York Michael Bloomberg, milliardaire et philantrophe, qui a beaucoup contribué à soutenir les arts dans sa ville.

Mais lundi, il a déclaré qu'il ne volerait pas au secours du NYCO, expliquant à des journalistes que le «modèle économique ne sembl(ait) pas fonctionner. Le gouvernement de la ville ne peut pas soutenir toutes les institutions artistiques», a-t-il ajouté, expliquant aussi que sa Fondation avait «beaucoup d'autres choses à faire».

C'est avec le NYCO que Placido Domingo ou la soprano américaine Beverly Sills avaient lancé leur carrière dans les années 1960.

Parmi les noms ayant également profité du NYCO, Sherrill Milnes, Maralin Niska, Carol Vaness, José Carreras, ou Catherine Malfitano.

La représentation samedi soir d'«Anna Nicole», sur la vie tragique de la stripteaseuse et actrice américaine Anna Nicole, décédée en 2007, restera comme la dernière du NYCO.

Présentée à l'académie de musique de Brooklyn, elle était chargée d'une émotion toute particulière. Certains musiciens étaient en larmes en venant saluer la salle, avant que le rideau ne se ferme pour la dernière fois.

Peu avant, Placido Domingo avait regretté cette mort annoncée.

«Je ne suis qu'un des très nombreux chanteurs qui ont reçu une formation et des encouragements essentiels de cette compagnie durant ses 70 ans d'existence», avait-il déclaré au Wall Street Journal. «C'est terrible qu'une ville aussi grande et riche que New York ne puisse pas soutenir une deuxième maison d'Opéra, qui soit capable de prendre des risques avec le répertoire, d'engager des chanteurs relativement inexpérimentés et de mener d'autres expériences qu'un ensemble aussi énorme que le Met (le Metropolitan Opera) ne peut tout simplement pas faire».