L'Orchestre de chambre McGill, faut-il le rappeler, ne fait pas partie des ensembles instrumentaux de l'illustre université (tous formés d'étudiants) et il n'entre pas non plus dans sa 74e saison, comme il le proclame. Ces deux points ont été clarifiés il y a fort longtemps. Néanmoins, les petits mensonges persistent et un troisième s'y ajoute en ce début de saison.

Le programme d'ouverture s'appelle «Classiques américains/American Classics», mais son contenu a peu à voir avec ce titre. Seule justification : les pièces de Mark O'Connor, compositeur de 52 ans, natif de Seattle, dont la plus longue est un concerto pour violon en quatre mouvements, joué par l'auteur.

Le reste de ce programme dit «américain» comprend une pièce d'Aïrat Ichmouratov, compositeur russe établi à Montréal, et une pièce de Britten, qui est aussi britannique que son nom le laisse entendre. Rien d'américain là-dedans. Et pourtant...

La soirée est plutôt pénible. Tout d'abord, l'assistance est très faible et ne remplit même pas la moitié du parterre, seule section de la Maison symphonique qui soit restée ouverte. Avant le concert, le manager vient demander au public de faire un don à l'orchestre. Une enveloppe a été remise à chacun à cet effet, avec un petit papier sur lequel il est question de «notre petit bijou orchestral».

Écoutons donc le «bijou» qui joue de la musique. La pièce de huit minutes de M. Ichmouratov (présent au concert) est le dernier mouvement d'une symphonie de chambre qui, elle-même, est l'orchestration, par l'auteur, de son deuxième quatuor à cordes. Il y a là quelques bonnes idées d'orchestration, à la Chostakovitch (forcément!), et Boris Brott fait bien sonner ses cordes, même qu'on regrette qu'il ne nous donne pas la symphonie au complet, surtout par rapport à ce qui s'en vient...

Voici un premier O'Connor : Elevations. Du sous-Copland, avec des échos de barn dance, le tout d'un ennui incommensurable, et joué faux par surcroît. On ne comprend pas Boris Brott d'avoir programmé cette platitude digne tout au plus de quelque bled perdu du Far West.

La Simple Symphony de Britten s'ouvre sur les mêmes problèmes de justesse, mais les choses se tassent bientôt. Le mouvement en pizzicatos est précis et Brott confère une réelle expression à la Sentimental Saraband.

M. O'Connor paraît finalement, avec son violon, et montre qu'il sait en jouer - dans le genre violoneux, en tout cas. Mais son concerto, intitulé American Seasons, est infiniment trop long (38 minutes!) pour ce qu'il contient : du minimalisme, des ostinatos, des imitations de banjo, des restes de Vivaldi et de Barber, une cadence qui n'en finit plus... M. O'Connor revient même pour un rappel. C'est-à-dire l'occasion de fuir avant qu'il ne soit trop tard.

ORCHESTRE DE CHAMBRE McGILL. Chef d'orchestre : Boris Brott. Soliste : Mark O'Connor, violoniste. Samedi soir, Maison symphonique, Place des Arts.