Yannick Nézet-Séguin connaît bien son Requiem. Après l'avoir dirigé trois fois à Montréal (en 1999, 2000 et 2006), sa célébrité l'a conduit l'automne dernier jusqu'au Carnegie Hall avec le même Verdi et le légendaire Philadelphia Orchestra dont il vient de prendre la direction.

De retour à l'Orchestre Métropolitain, au milieu de représentations de La Traviata au Met, le jeune chef de 38 ans a fait salle comble dimanche après-midi à la Maison symphonique avec, de nouveau, ce Requiem qui marque le bicentenaire Verdi et pour lequel il éprouve une affection qu'il communique à tous, auditeurs silencieux et musiciens sans cesse en état d'alerte.

Cette fois encore, Nézet-Séguin a d'abord adressé quelques mots au public et, cette fois encore, il a dirigé de mémoire et chanté les paroles avec les 130 choristes qui surplombaient la masse orchestrale de 70 musiciens. Avec des gestes tranchants ou plus discrets, selon le cas, il obtient une interprétation tour à tour explosive et apaisante, fidèle à cette partition qui tient à la fois du sacré et du théâtral et oscille entre le «tutta forza» et le «estremamente piano».

Les violoncelles sont parfois un peu faibles, mais l'ensemble de l'orchestre est magnifique et Nézet apporte un relief inhabituel à maints détails: la séquence aux trois flûtes, les lourds pizzicati des cinq contrebasses placées au pied du choeur, et les terrifiants coups de grosses caisses, d'une violence incroyable. Le choeur est très solide, dans ses composantes et dans son tout, et un grand soin a été apporté à la prononciation du latin.

Les quatre voix solistes s'harmonisent bien dans les ensembles; isolées, elles sont plus ordinaires et sans personnalité. Seul connu, le ténor canadien John Mac Master n'a pas la voix italienne requise, son style de chant est gros et son «Hostias» sonne effectivement comme le juron que l'on sait. La soprano américaine Ailyn Pérez (qui remplace celle qu'on annonçait) possède une bonne voix et un minimum d'expression. Dommage qu'elle se présente dans un Requiem en tenue de vamp. L'Écossaise Karen Cargill a une belle couleur de mezzo, rien de plus, et le Britannique Andrew Foster-Williams chante la partie de basse avec une voix de baryton et n'en tire absolument rien.

En exagérant à peine, on pourrait dire qu'il s'agit là d'un Requiem sans solistes.

ORCHESTRE MÉTROPOLITAIN et CHOEUR DE L'OM (dir.: François Ouimet et Pierre Tourville). Chef d'orchestre: Yannick Nézet-Séguin. Solistes: Ailyn Pérez, soprano, Karen Cargill, mezzo-soprano, John Mac Master, ténor, et Andrew Foster-Williams, baryton. Dimanche après-midi, Maison symphonique, Place des Arts. (Radiodifusion: Radio-Canada: 26 mars, 20 h)

Programme: Messa da Requiem, pour quatre voix solistes, choeur mixte et orchestre (1874) - Verdi