Musicien polyvalent très apprécié du public d'ici, Alexandre Tharaud revient cette semaine en sol québécois pour quatre concerts avec les Violons du Roy. Il a discuté avec La Presse de ses plus récents projets, dont un rôle au cinéma et son nouveau disque en hommage au swing des années folles.

Q : Vous jouez régulièrement avec les Violons du Roy. Quelles sont vos affinités avec cet orchestre?

R : Il y a eu un coup de foudre entre nous au Domaine Forget, en 2008, lors de notre premier concert ensemble. Dès que nous sommes sortis de scène, nous avons eu envie de poursuivre ce travail sur disque. Les Violons du Roy me semblent uniques par leur choix de jouer de la musique baroque sur des instruments modernes, avec des archets baroques. Le fait que je joue Bach sur un piano moderne me dirigeait naturellement vers cet orchestre, qui avait cette manière hybride de jouer. Dans le répertoire qui constitue leur cheval de bataille, Haydn, Mozart et la musique baroque, ils font partie des meilleurs.

Q : Comment envisagez-vous le jeu de Bach au piano moderne?

R : Au départ, certains des concertos pour clavier de Bach avaient été écrits pour violon. Ils avaient déjà une dimension orchestrale. Le piano moderne est un instrument orchestral par définition, qui peut imiter diverses couleurs d'instruments. C'est pourquoi je pense que l'on peut jouer cette musique au piano sans trahir le compositeur. L'important est de retrouver le compositeur, et cela peut se faire par des chemins détournés.

Q : Le programme de vos concerts au Québec comprend un concerto de Mozart. Or, ce compositeur ne figure pas dans votre abondante discographie. Pourquoi?

R : J'aimerais bien, justement, l'enregistrer un jour avec les Violons du Roy. Ça pourrait être un projet que l'on ferait ensemble. J'ai déjà eu un projet de disque d'oeuvres de Mozart il y a cinq ans, qui a été abandonné. Cela me trotte toujours dans la tête. J'ai joué beaucoup de ses concertos, et celui que je vais jouer à Montréal, le 23e, est l'un des plus grands chefs-d'oeuvre de la musique.

Q : Votre dernier disque, Le boeuf sur le toit, est complètement différent de tout ce que vous avez fait auparavant. Pouvez-vous en parler?

R : Le boeuf sur le toit était le titre d'une pièce de Darius Milhaud, mais c'est devenu le nom d'un lieu de convivialité pour le Tout-Paris ouvert en 1922 par Jean Cocteau. Pendant des années, il a cristallisé ce qu'ont été les années 20 à Paris. Étaient là tous les soirs des compositeurs, des cinéastes, des écrivains et des artistes populaires, comme Satie, Ravel, Chaplin, Picabia, Simenon, Maurice Chevalier. Ils se retrouvaient autour du jazz, une musique nouvelle pour eux, et discutaient sans barrière sociale ni artistique. C'est un phénomène que l'on n'a pas retrouvé dans l'histoire en France. Mon disque rend hommage à cette époque et à ce lieu.

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Alexandre Tharaud et Les Violons du Roy, ce soir, à 19 h 30, et demain, à 14 h, salle Bourgie.