À peine sorti d'un véritable marathon de spectacles un peu partout au Québec, Marc Hervieux entre dans la peau de Gabriel von Eisenstein, personnage principal de La chauve-souris. Cette adaptation française de Die Fledermaus, opérette viennoise de Johann Strauss fils, est présentée à l'Opéra de Montréal à compter de ce soir.

La production marque aussi le retour du ténor à l'Opéra de Montréal, où l'on ne l'a pas entendu depuis qu'il a incarné Canio dans Pagliacci, en 2009. Depuis lors, le chanteur, devenu l'un des chouchous du public, a été pris dans un tourbillon constant de disques et de tournées.

«J'ai donné 26 spectacles de Noël en 30 jours dans tout le Québec. Ensuite, j'ai pris quelques semaines pour reposer ma voix. Eisenstein est un rôle que j'ai déjà chanté il y a deux ans, à l'Opéra de Québec, mais cette fois, le texte est différent car ce n'est pas du tout la même adaptation en français. Il faut dire aussi que l'opérette, c'est loin de ce que j'ai toujours fait comme rôles depuis 16 ans, alors que j'ai surtout chanté dans des opéras sérieux. Je m'amuse beaucoup.»

Les répétitions allant déjà bon train au moment de rencontrer La Presse, le chanteur retrouvait graduellement ses repères et son personnage.

«Moi ce que je trouve le plus difficile, c'est de m'asseoir et d'étudier un rôle avec concentration, car ce n'est pas dans ma nature. J'aime mieux bouger et être dans le feu de l'action. Certains chanteurs se préparent très longtemps d'avance et arrivent impeccables aux répétitions. Chacun de leurs gestes est parfaitement structuré et prévu. Avec l'horaire que j'ai, c'est difficile. Je préfère mettre les bouchées doubles en travaillant intensivement dans les mois et les semaines qui précèdent. C'est aussi le genre de performeur que je suis. J'aime avoir la possibilité d'être spontané, d'observer les choses en répétitions et d'ajouter ce qui me plaît, même si cela comporte une part de risque et que ce n'est pas la méthode qui m'a été enseignée.»

Projets

Il s'agit encore d'une année chargée pour le chanteur, qui continuera de jongler avec les genres musicaux. En février, il enregistre un nouveau disque consacré aux grands succès francophones en version symphonique avec l'Orchestre symphonique de Québec, sous la direction du chef Stéphane Laforest.

«Il va y avoir des chansons de Brel, Bécaud, Ferland, Daniel Lavoie, Charlebois, et d'autres, arrangées par Simon Leclerc. C'est un projet emballant. Je travaille aussi sur un deuxième album de chansons pop originales qui devrait sortir à l'automne.»

En avril, Calgary l'attend pour une production de La Traviata, où il sera Alfredo, et ensuite soliste dans le Requiem de Verdi avec le Calgary Philharmonic Orchestra. Puis, en mai, il sera le Brésilien de La vie parisienne, d'Offenbach, à l'Opéra de Québec. En parallèle à tous ces projets, il poursuit sa tournée A Napoli, dont le disque éponyme s'est vendu à 50 000 exemplaires.

Adoré du public, le ténor ne fait peut-être pas l'unanimité auprès des puristes qui déplorent ses incartades populaires, mais cela ne l'empêche pas de poursuivre son chemin.

«Si, dans ma vie, j'avais commencé à écouter les critiques, je serais resté chez moi dans mon salon et j'attendrais que la vie passe. Je préfère aller de l'avant.»

__________________________________________________________________________

À la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, les 26, 29, 31 janvier et 2 février.



De l'apprentissage à la première

Un rôle et une opérette ne se construisent pas du jour au lendemain. Aperçu des étapes par le regard de Marc Hervieux.

Deux mois avant

Le chanteur passe à travers la partition entière avec l'aide du pianiste et coach Claude Webster.

Les mois suivants

Il mémorise graduellement les paroles.

Trois semaines avant la première

Les répétitions commencent.

1ère et 2e semaine

Six heures par jour, six jours par semaine, répétitions en studio. Par terre, des lignes de couleurs marquent l'emplacement des décors. Les chanteurs mémorisent leurs déplacements à l'intérieur de ces lignes.

Fin de la 2e semaine

Les chanteurs enchaînent l'opérette en entier, sans arrêt, avec piano. Le metteur en scène commente.

3e semaine

Les répétitions se transportent sur la scène de Wilfrid-Pelletier.

1er jour

Répétition sans costumes. Les chanteurs découvrent les décors et ajustent leurs déplacements.

2e jour

Répétition musicale avec orchestre

3e jour

On ajoute les costumes.

4e jour

Générale avec costumes, maquillage et perruques devant un public invité.

Soir de la première

Photo: Ivanoh Demers, La Presse

Marc Hervieux et Dominique Côté en répétition.

Dans le Montréal des années 30

La chauve-souris de l'Opéra de Montréal ne se déroule pas à Vienne, mais dans le Montréal des années 30.

«Quand on m'a proposé les décors et les costumes loués à Opera Australia, il s'agissait au départ d'une transposition dans le New York des années 30. En les voyant, je me suis dit que cela devait absolument se passer en Amérique du Nord, mais que ce serait étrange que l'action se déroule en français à New York.

«La solution logique était de la situer à Montréal. Cela simplifiait aussi les choses pour les interprètes anglophones et francophones, sachant qu'il y avait déjà un bon mélange linguistique à Montréal à cette époque.

«Les dialogues sont donc principalement en français, avec certaines parties en anglais, et des surtitres dans les deux langues. Michel Beaulac et moi avons adapté le texte français existant pour que ce soit plus près de la langue d'aujourd'hui», explique Oriol Thomas, metteur en scène.

Photo: Ivanoh Demers, La Presse

Marianne Lambert en répétition pour La chauve-souris.