Trois oeuvres composaient le premier «Dimanche en musique» de l'Orchestre Symphonique de Montréal. Curieusement, celle qui reçut l'interprétation la moins intéressante est la plus considérable et la plus importante des trois. C'est Le Sacre du printemps de Stravinsky. Kent Nagano l'a programmé pour marquer le centenaire de la création, mais son hommage devance de plusieurs mois la date même de la tumultueuse et légendaire première mondiale. Nous sommes encore en 2012. Or, le Sacre fut créé le 29 mai 1913, à Paris, et rien ne figure au calendrier de l'OSM le 29 mai 2013. La veille et le lendemain, soit les 28 et 30, Nagano dirigera Jeanne d'Arc au bûcher de Honegger...

L'exécution de dimanche était la troisième en deux mois. Nagano et l'OSM ont donné le Sacre au concert final du Festival de Lanaudière, le 4 août, et l'ont repris à la soirée «électronique» de vendredi dernier. L'oeuvre est entrée au répertoire de l'OSM en 1957 (autre anniversaire, cette fois le 55e); elle passa entre les mains de nombreux effectifs différents, fut jouée ici et à l'étranger, puis enregistrée avec Dutoit. Sa nouveauté est inchangée; en fait, il s'agit peut-être de l'oeuvre la plus révolutionnaire du XXe siècle.

L'exécution de dimanche découvrit d'inexplicables problèmes d'intonation chez les bois. Pour le reste : une direction sans conception précise, une lecture en place mais routinière.

Les meilleurs moments vinrent avant l'entracte. Le concert s'ouvre sur un orchestre réduit de moitié pour Haydn et sa Symphonie no 94, dit Surprise. Le surnom vient du gros accord «fortissimo» jeté au milieu de la phrase très douce sur laquelle débute le mouvement lent. En répétant la phrase, Nagano nous prépare au choc en diminuant la dynamique de «piano» à «pianissimo», comme l'indique la partition. Une joie contagieuse anime le Menuet et le tout est absolument réjouissant.

L'oeuvre et le compositeur qui suivent semblent nouveaux mais ne le sont pas. An Orkney Wedding, with Sunrise, de Sir Peter Maxwell Davies, a été donné à l'OSM par Dutoit en mai 2000 et au Métropolitain par Nézet-Séguin en mars 2007. En 14 minutes, la pièce décrit une noce écossaise où l'on boit un peu trop, les contre-temps du violon-solo Richard Roberts soulignant bien l'atmosphère. Deux minutes avant la fin, un joueur de cornemuse, en kilt, s'avance lentement devant l'orchestre. Il représente ce que le compositeur appelle «l'aube qui dégrise».

Nagano et l'orchestre ont pris - et communiqué - un plaisir évident à l'aventure écossaise. Le «soliste» de cette intervention de deux minutes était Alan J. Jones, un Gallois établi au Québec, qui possède une collection de 250 cornemuses. Il en présenta plusieurs au public après le concert et en fit entendre quelques-unes.

ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef d'orchestre : Kent Nagano. Dimanche après-midi, Maison symphonique, Place des Arts. Série «Dimanches en musique».

Programme:

Symphonie no 94, en sol majeur, Hob. I : 94 (Surprise) (1791) - Haydn

An Orkney Wedding, with Sunrise (1985) - Maxwell Davies

Le Sacre du printemps (1913) - Stravinsky