Ce n'est pas parce que l'on est octogénaire que l'on devrait arrêter de faire de la musique, bien au contraire! C'est bien ce que croit Michel Legrand, qui s'offre une tournée internationale pour célébrer ses 80 ans, et sera en concert lundi à la Maison symphonique avec les Violons du Roy.

«Je n'ai jamais arrêté, je n'arrêterai jamais, et c'est la raison pour laquelle je ne mourrai jamais, car la musique, c'est ma vie! plaisante-t-il au téléphone. J'ai beaucoup fait, mais j'ai encore beaucoup à faire.»

L'auteur des Parapluies de Cherbourg voyage donc cette année au Canada, aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Russie pour présenter ses grands succès dans de nouvelles orchestrations, chaque fois avec des ensembles musicaux des pays d'accueil. Il s'agit du même concert présenté au Palais Montcalm, à Québec, en juin.

«J'essaie toujours de prendre des musiciens locaux, quand c'est possible. Les Violons du Roy sont un orchestre superbe, que je vais diriger du piano.»

Une carrière exceptionnelle

Pianiste, chanteur, compositeur, jazzman, arrangeur, Michel Legrand a tout fait en musique. Il a composé plus de 200 musiques pour le cinéma ou la télévision et remporté trois Oscars et deux Golden Globes. Il a aussi fait lui-même la mise en scène de deux films. Quand on lui demande d'évoquer un souvenir marquant, le voilà donc bien embêté de choisir!

«J'ai travaillé avec tellement de musiciens extraordinaires, dans le classique comme dans le jazz, dit-il. J'ai eu la chance de travailler avec Miles Davies, John Coltrane, Stan Getz, Barbra Streisand, Ray Charles, Natalie Dessay, Jessye Norman, et tant d'autres. Ce n'est pas un souvenir que j'ai, c'est mille souvenirs!»

Et mille projets aussi. Il composé récemment, pour la première fois de sa vie, la musique d'un ballet, Liliom, sur commande du chorégraphe américain John Neumeier, qui a été créé par les Ballets de Hambourg l'an dernier, et fera le tour du monde.

Sa prochaine entreprise est particulièrement intéressante pour le Québec, puisqu'il s'agit d'un film musical qui sera tourné en grande partie à Montréal, l'an prochain. L'amour aveugle est une coproduction France-Québec, en collaboration avec le producteur Pierre Gendron, de Zoofilm. La distribution n'est pas encore déterminée.

«Pour ce film, j'ai trouvé un moyen d'utiliser la musique au cinéma comme on ne l'a jamais essayé encore, dit-il. C'est une expérience. Si ça fonctionne bien, ce sera une petite révolution, et si ça ne fonctionne pas, ce sera une catastrophe. Pendant toute ma carrière, je n'ai fait que cela, des expériences. J'ai beaucoup fait changer la musique au cinéma et fait évoluer les orchestrations.»

Il déplore la direction que prend la musique de film depuis une décennie.

«Ce qui se passe aujourd'hui me rend triste. Il n'y a plus de formidables compositeurs de musique de films. Avant, il y avait John Williams, Henri Mancini, Ennio Morricone, et maintenant, qui avons-nous? Personne. On a des musiciens qui ne savent pas écrire. Ils ne sont pas compositeurs, mais vaguement mélodistes. La musique de film est en perdition.»

Les Violons du Roy fêtent Michel Legrand, le 17 septembre, à 19h30, Maison symphonique de Montréal.