Le Nouveau Quatuor à cordes Orford, qui a pris la succession d'un ensemble né en 1965 au Centre d'arts Orford, ne se produit qu'une fois cet été à Orford même mais joue trois fois au Festival de Lanaudière, c'est-à-dire en territoire concurrent. On se dit qu'en contrepartie, le Centre d'arts Orford pourrait inviter la Sinfonia de Lanaudière, surtout que son chef Stéphane Laforest, qui dirige aussi l'Orchestre symphonique de Sherbrooke, est connu dans la région.

Dans l'immédiat, c'était, lundi soir, dans la belle église de L'Assomption, le premier des trois concerts lanaudois du Nouveau Orford. Malgré la pluie de début de soirée, il est venu quelque 200 auditeurs. Et malgré l'orage qui s'est déchaîné sur eux au sortir de l'église, tous, j'en suis sûr, étaient heureux d'avoir été là.

Les musiciens du Nouveau Orford viennent, comme on sait, des deux principaux orchestres du pays: le violoniste Jonathan Crow et l'altiste Eric Nowlin sont du Toronto Symphony, le violoniste Andrew Wan et le violoncelliste Brian Manker, de l'OSM. Ils sont donc attachés en permanence à des orchestres, avec les responsabilités que cela implique, sans compter la distance appréciable qui les sépare. Comment parviennent-ils, dans ces conditions, à exister pleinement en tant que quatuor à cordes?

La question m'est venue à l'esprit pendant le K. 590 de Mozart, qui ouvrait le programme. Ce Mozart s'est bien déroulé, mais il fut aussi marqué de légères imprécisions. Or, cette musique ne pardonne pas. Au mieux, ce fut là une interprétation dont on ne conservera aucun souvenir. Par contre, le premier des trois Quatuors Razoumovsky de Beethoven fut magnifique, avec de riches gradations dynamiques dans l'Allegretto et une véritable atmosphère de tristesse dans l'Adagio.

Malgré des conditions de vie difficiles, le Nouveau Orford peut donc sonner comme un vrai quatuor... dans le Beethoven tout au moins. Il s'est même surpassé dans le mouvement lent du Quatuor de Debussy, ajouté en rappel malgré la chaleur qui lui avait fait omettre la dernière reprise dans le Beethoven. Que s'est-il donc passé? Le malaise vient manifestement de la décision du Nouveau Orford de faire alterner ses deux violonistes. Le Emerson peut se permettre ce luxe car MM. Drucker et Setzer sont d'égale force. Ce n'est pas le cas du Nouveau Orford. Le très jeune Andrew Wan est excellent comme violon-solo de l'OSM mais, au quatuor, il n'a ni l'envergure musicale, ni l'expérience du vétéran Jonathan Crow. Or, c'est Wan qui était au premier pupitre dans le Mozart. Il l'était aussi dans le Stravinsky, mais, dans ce cas, pas de problèmes: cela se ramène à des effets faciles qui tiennent en huit minutes.

NOUVEAU QUATUOR À CORDES ORFORD - Jonathan Crow et Andrew Wan (violons), Eric Nowlin (alto) et Brian Manker (violoncelle). Lundi soir, église de L'Assomption. Dans le cadre du 35e Festival de Lanaudière.

Programme: Quatuor no 23, en fa majeur, K. 590 (1790) - Mozart Trois pièces pour quatuor à cordes (1914) - Stravinsky Quatuor no 7, en fa majeur, op. 59 no 1 (1806) - Beethoven