On ne connaît absolument pas ici l'Orchestre académique de Zurich, qui existe pourtant depuis 1897. La formation suisse effectue présentement sa première tournée en Amérique, limitée à cinq concerts au Canada: deux au Québec et trois en Ontario.

Orchestre de chambre à ses débuts, l'Akademisches Orchester Zürich (son nom officiel allemand) est maintenant un orchestre symphonique de 80 jeunes musiciens et musiciennes qui offre la particularité d'être constitué non pas d'étudiants en musique, comme c'est généralement le cas, mais d'étudiants en d'autres disciplines (médecine, histoire, génie, etc.) d'institutions d'enseignement supérieur de Zurich.

La première visite ici de cet orchestre inconnu n'a malheureusement pas été encadrée comme elle aurait dû l'être. L'information, qui nous est parvenue il y a quelques jours seulement, était très approximative et le programme remis à la porte disait trop peu sur l'orchestre lui-même. Ainsi, il eût été intéressant d'y trouver les noms de tous les musiciens, avec les disciplines qu'ils représentent. En fait, sur 80 musiciens, trois seulement sont effectivement étudiants en musique.

Je tiens cette précision du chef lui-même, Johannes Schlaefli, qui explique par ailleurs que l'orchestre, lorsqu'il va en tournée, inclut toujours dans son programme une double participation du pays où il se rend. Pour la présente tournée, l'orchestre avait commandé une pièce au Montréalais Éric Champagne, Mouvement symphonique no 1, et avait invité la jeune violoncelliste Denise Djokic, native de Halifax, pour le Concerto de Dvorak.

Très peu médiatisé, l'événement n'avait attiré que 200 personnes environ, de toute évidence des nouveaux venus au concert. L'écoute était attentive, mais il y eut des applaudissements après chaque mouvement et même au milieu du mouvement lent du Dvorak.

La scène de Pollack Hall, remplie de part et d'autre de musiciens avec leurs instruments, offrait le même spectacle qu'à l'Orchestre symphonique de McGill, qui y joue régulièrement en saison. Mais ces jeunes venus de Zurich sont des amateurs qui ne se destinent pas à une carrière de musiciens. Tout n'est donc pas parfait (dans les attaques, par exemple), comme il peut l'être certains soirs à McGill. Quand même, l'ensemble reste tout à fait remarquable: toutes les sections sont solides et bien équilibrées, la sonorité collective est celle d'un orchestre digne de ce nom et certains premiers-pupitres sont d'une étonnante qualité : la flûte dans le Dvorak, le cor et le basson dans la cinquième Symphonie de Tchaïkovsky.

Dirigeant le Tchaïkovsky de mémoire, et très au fait de tout ce qui se passe dans l'orchestre, le chef obtint de sa jeune troupe une interprétation à la fois puissante et expressive qui retint notre attention pendant ses 45 minutes de durée.   

Créée à Zurich le 29 mai et reprise à Québec le 4 juillet, la pièce foncièrement tonale d'Éric Champagne se déploie à pleine force, en huit minutes seulement, sur plusieurs strates en même temps et puise abondamment au catalogue russe des couleurs orchestrales. Le chef invita l'auteur à saluer l'auditoire.  

Le nom de Denise Djokic étant associé à quelques concerts plutôt pénibles, je m'attendais au pire. Sur son nouveau violoncelle, un Antoniazzi moderne de 1901, la délicate et discrète jeune femme livra son Dvorak plus qu'honorablement. Elle connut quelques légers problèmes dans les passages rapides et complexes, mais elle maintint tout le mouvement lent à un impressionnant niveau de justesse et d'émotion.

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AKADEMISCHES ORCHESTER ZÜRICH. Chef d'orchestre : Johannes Schlaefli. Soliste: Denise Djokic, violoncelliste. Vendredi soir, Pollack Hall de l'Université McGill.

Programme: Mouvement symphonique no 1 (2011) - Champagne

Concerto pour violoncelle et orchestre en si mineur, op. 104, B. 191 (1895) - Dvorak

Symphonie no 5, en mi mineur, op. 64 (1888) - Tchaïkovsky