Maxim Vengerov fit ses débuts ici le 22 juillet 1995, à un mois de ses 21 ans, au Festival de Lanaudière. Il avait alors joué le Concerto de Tchaïkovsky avec Dutoit et l'OSM. Le violoniste natif de Sibérie revint plusieurs fois à l'OSM, comme soliste, bien sûr, mais aussi comme chef, ayant abandonné l'archet pour des raisons obscures.

D'autant plus obscures, ces raisons, que Vengerov, dont on était sans nouvelles, nous revient, à 37 ans, comme violoniste à part entière, comme s'il n'avait jamais quitté la scène, présenté par la Société de musique de chambre de Montréal dont le fondateur et directeur général, Patrice Laré, l'accompagne au piano.

C'était le premier récital de Vengerov à Montréal et la Maison symphonique était presque remplie. À l'arrière de la corbeille, le son du violon me parvenait avec une parfaite clarté. Mais la grande question: Vengerov a-t-il changé? Pas vraiment.

Sans l'annoncer, il intervertit l'ordre des deux premières pièces et commence donc par la deuxième Partita pour violon seul de Bach. Jouant de mémoire et faisant toutes les reprises, Vengerov nous donne un Bach idéal. Toujours rigoureux et toujours expressif, il colore les différents registres de façon à souligner la structure de l'oeuvre, principalement dans la célèbre Chaconne finale.

Première pièce annoncée mais deuxième à être jouée, la Sonate de Handel appartient à ce répertoire qui servait autrefois de «réchauffement» en début de récital et qui est oublié aujourd'hui. Et pour cause. Cette musique reste insipide, mais elle met en valeur la sonorité et la souplesse d'archet d'un virtuose comme Vengerov. Vérification faite, il jouait bel et bien sur le Stradivarius de 1727 mentionné dans le programme.

Brahms occupe l'après-entracte. Tout d'abord, le Scherzo qui constitue la contribution de Brahms à la Sonate collective F. A. E., dont les autres mouvements sont de Schumann et de son élève Albert Dietrich. Ensuite, la troisième et dernière Sonate du même Brahms, l'op. 108.

On retrouve là toutes les caractéristiques qui, à un moment donné, firent de Vengerov le plus grand violoniste du monde: un archet qui glisse amoureusement sur les cordes, comme le prolongement de lui-même, un violon qui chante et qui, mieux encore, dans l'Adagio, semble nous parler.

Dans cette belle réussite musicale, il faut compter la participation de Patrice Laré, solide pianiste et chambriste toujours attentif. Quelques petits accidents, chez lui comme chez le violoniste, sont négligeables.

Ovationné et rappelé par la salle debout, Vengerov annonce deux rappels: la Danse hongroise no 1 de Brahms, encore, et la Méditation de l'opéra Thaïs de Massenet dans sa version originale pour violon et dont la fin tout en douceur est hélas! interrompue par des applaudissements venus trop tôt.

MAXIM VENGEROV, violoniste, et PATRICE LARÉ, pianiste. Lundi soir, Maison symphonique, Place des Arts. Présentation: Société de musique de chambre de Montréal.

Programme :

Partita pour violon seul no 2, en ré mineur, BWV 1004 (c. 1720) - Bach

Sonate pour violon et clavecin op. 1 no 4, en ré majeur, HWV 371 (1749)  - Handel

Scherzo en do mineur de la Sonate F. A. E., pour violon et piano (1853) - Brahms

Sonate pour violon et piano no 3, en ré mineur, op. 108 (1886-88) - Brahms