Actif sur la scène internationale, Cyprien Katsaris n'a pas joué à Montréal depuis environ 20 ans. Il est de retour dans un récital entièrement romantique consacré à Liszt et à Chopin, samedi, au Théâtre Outremont.

À son programme, on remarque deux modes d'expression pianistiques qui ne sont pas la norme dans les récitals de nos jours: improvisation et transcription. Il rendra en effet hommage à Liszt avec une improvisation spontanée dans le style du compositeur.

«J'improvisais beaucoup quand j'étais plus jeune, dit-il. C'est un virus qui m'a repris récemment. Je trouve malheureux qu'aujourd'hui, seuls les pianistes de jazz et les organistes improvisent. Les pianistes classiques le font très rarement. Peut-être est-ce une question de mode, ou que cela ne fait pas partie de leur formation. Je prétends pourtant que tout le monde possède cette créativité en lui.»

Il jouera aussi le deuxième Concerto de Liszt, qu'il a transcrit lui-même pour piano seul. On sait que Liszt était lui-même un grand transcripteur. Katsaris s'est d'ailleurs rendu célèbre en enregistrant, dans les années 80, l'intégrale des symphonies de Beethoven transcrites pour piano par Liszt. Ayant comparé note par note les partitions de Liszt à celles des symphonies originales, Katsaris s'est pris au jeu.

«Le but des transcriptions n'est pas uniquement de satisfaire une envie d'éblouir le public, dit-il. C'est avant tout de transmettre les intentions du compositeur et les couleurs orchestrales à travers le piano. Cela devient une nouvelle création. On peut considérer que le piano, par rapport à l'orchestre, est une photographie en noir et blanc, puisque l'orchestre possède une diversité de timbres que le piano n'a pas. Mais une photo en noir et blanc peut être aussi belle qu'une photo en couleurs. De plus, la pratique des symphonies au piano m'a obligé à développer le sens du phrasé, des couleurs et des plans sonores. Quand je joue une oeuvre pour piano seul, il m'arrive d'avoir l'impression d'entendre des coups d'archet ou le chant d'une clarinette.»

On entendra aussi, entre autres, Bénédiction de Dieu dans la solitude et Nuages gris de Liszt, ainsi qu'une dizaine d'oeuvres de Chopin.

Nouveau disque

Le musicien lance également ces jours-ci un nouveau disque en collaboration avec la pianiste québécoise Hélène Mercier, qui a beaucoup joué en duo avec Louis Lortie.

«On y trouve d'abord la Sonate pour deux pianos en fa mineur de Brahms, une adaptation de son fameux Quintette pour piano et cordes op. 34. La nature des relations entre Brahms et Clara Schumann demeure pour nous mystérieuse. Brahms avait d'abord écrit ce quintette seulement pour cordes, mais Clara était mécontente qu'il n'y ait pas de piano, alors il l'a ajouté. C'est sans doute pour elle qu'il l'a aussi transformé en sonate pour deux pianos. Et il y a quelques années, je suis tombé sur une partition très rare: le Quintette avec piano op. 44 de Schumann arrangé pour piano quatre mains par Clara Schumann elle-même. J'ai pensé que ce serait une bonne idée d'enregistrer les deux sur un même album avec une partenaire féminine.»

Il y a dix ans, le musicien fondait sa propre étiquette de disque, Piano 21, pour avoir une liberté totale sur ses enregistrements. Car il demeure un pianiste dont le style ne fait pas l'unanimité.

«Parmi les pianistes des 60 dernières années, j'en ai eu ras le bol d'entendre des gens qui jouaient de manière académique, dit-il. C'est peut-être la raison pour laquelle je ne plaisais pas toujours aux critiques, mais je m'en moque éperdument!»

Cyprien Katsaris, samedi, 20h, au Théâtre Outremont.