Monter L'Incoronazione di Poppea n'est pas très original. McGill, qui en fait le gros événement de son «Année de musique ancienne», avait donné en première ici dès 1995 ce plus célèbre (et dernier) des opéras de Monteverdi. L'Opéra de Montréal avait suivi en 2000 et l'Université de Montréal, en 2007.

Le scénario s'inspire librement de faits historiques. Néron cherche à se débarrasser de son épouse Octavie pour placer sur le trône sa maîtresse Poppée. Pour se venger, Octavie persuade Othon, l'époux trompé de Poppée, de tuer celle-ci. Néron découvre la machination, chasse Octavie de Rome et fait couronner Poppée impératrice.

Entracte compris, tout cela fait une très longue soirée de trois heures qui ne finit plus de vouloir finir. Le spectacle en soi est fort beau cependant, avec beaucoup de mouvement et d'imagination. Ainsi, les personnages allégoriques (la Fortune, l'Amour et la Vertu) deviennent ici statues vivantes et présentes du commencement à la fin. Décor joli, bien que toujours le même; costumes d'époque, comme il se doit.

Chose rare à McGill, la distribution est la même pour les quatre représentations. On compte 30 rôles, d'importance variable, certains sujets en défendent plus d'un, et presque tous sont bons, comme chanteurs et comme comédiens. Quelques-uns se détachent de l'ensemble : April Babey, Octavie à la voix placée et à la forte présence, David Tinervia, Othon émouvant et vocalement solide (après un début hésitant), et Peter Walker, très digne Sénèque à l'étonnant registre grave. Condamné à se suicider, les adieux qu'il fait à ses trois amis sont ici très touchants. Rebecca Woodmass, en robe dorée, est une Poppée très belle à la voix un peu stridente. Belle égalité vocale et expressive chez la petite Michaela Dickey en confidente d'Octavie. Sans doute créé par un castrat, le rôle de Néron est souvent chanté par une femme, ce qui est le cas ici. Mais Katherine Maysek y est peu convaincante, à tous égards. C'est ma seule réserve.

Dans la fosse, Hank Knox dirige du clavecin un excellent petit ensemble baroque.

L'INCORONAZIONE DI POPPEA, opéra en un prologue et deux actes, livret de Giovanni Francesco Busenello, d'après Tacite, musique de Claudio Monteverdi (1642). Production : Atelier d'opéra de l'Université McGill. Mise en scène : Patrick Hansen. Décors : Vincent Lefèvre. Costumes : Ginette Grenier. Éclairages : Serge Filiatrault. Orchestre baroque de McGill. Dir. Hank Knox. Avec surtitres français et anglais.

Pollack Hall de McGill. Première hier soir. Reprises : auj. et dem., 19 h 30, et dim., 14 h.