Le jeune Quatuor Pacifica, connu par son intégrale des cinq Quatuors d'Elliott Carter, a fait salle comble pour ses débuts à Montréal. L'attente était grande, la déception le fut aussi. L'ensemble américain, formé en 1994 sur la Côte Ouest, groupe une femme premier-violon d'origine pakistanaise, un second-violon islandais, un altiste nippo-norvégien et un violoncelliste hongrois. Pour deux des oeuvres de son programme, il s'était adjoint l'altiste britannique Roger Tapping, seul des cinq à s'être déjà produit ici, comme membre du Quatuor Takacs.

La déconvenue s'installe dès la première pièce. Le Sol mineur, le plus beau, peut-être, des Quintettes de Mozart, est lu machinalement, vidé de sa densité, et n'est même pas irréprochable techniquement. Madame le premier-violon ne joue pas vraiment faux. Le problème, c'est qu'elle ne joue pas vraiment juste. Et thank you pour le splendide grincement à la fin!

Le Pacifica doit jouer les 15 Quatuors de Chostakovitch en mai au Festival de Denis Brott. Hier, avec le neuvième, il nous en offrait un avant-goût... amer, faut-il préciser. Madame le premier-violon (encore elle!) ignore la moitié des glissandos indiqués. Par contre, dans le passage où le violon relie, seul, le deuxième mouvement au troisième, elle souligne bien la nuance de dynamique p/pp des notes staccato. C'est tout ce qu'il y a à retenir de ces 27 minutes. Dans l'Allegro final, je vois les quatre se démener comme des diables, mais sans effet. Vendredi soir, notre Molinari remuait mer et monde dans cette même page. Est-il possible de passer ainsi à côté de l'essence d'une oeuvre? Hélas! oui. Le Pacifica nous reviendra donc en mai pour l'intégrale Chostakovitch. Souhaitons qu'il s'agisse d'une fausse rumeur.

Le Quintette Op. 97 de Dvorak nous vaut une bonne demi-heure rafraîchissante après l'entracte. Cette musique d'une charmante naïveté, sans profondeur, aux éléments folkloriques puisés chez les Indiens d'Amérique que Dvorak côtoya, se révèle davantage à la portée des visiteurs. Spécialistes de Dvorak? Peut-être. Après tout, il n'y a pas de sot métier.

QUATUOR À CORDES PACIFICA - Simin Ganatra et Sibbi Bernhardsson (violons), Masumi Per Rostad (alto) et Brandon Vamos (violoncelle) - ROGER TAPPING, altiste. Hier après-midi, Pollack Hall de l'Université McGill. Présentation: Ladies' Morning Musical Club. Programme: Quintette no 4, en sol mineur, K. 516 (1787) - Mozart Quatuor no 9, en mi bémol majeur, op. 117 (1964) - Chostakovitch Quintette no 3, en mi bémol majeur, op. 97, B. 180 (1893) - Dvorak