Le National Youth Orchestra of Canada, organisme torontois qui fonctionne en anglais puis en traduction française sous le nom d'Orchestre National des Jeunes du Canada, a pour chef invité cette année le Britannique Jonathan Darlington, 55 ans, directeur musical du Vancouver Opera.

Pour cette 51e saison, l'orchestre compte 90 garçons et filles; exceptionnellement, ces effectifs représentent les 10 provinces canadiennes. Le «National Youth» - le nom qui lui reste collé - a entrepris sa tournée annuelle le 21 juillet à London, Ont., et la complétera le 9 août à Toronto. L'itinéraire comprend 10 concerts dans autant de villes de l'est du pays.

Deux programmes forment le répertoire de tournée. Vendredi soir, à la Basilique Notre-Dame, l'orchestre jouait le premier programme, qui comprend l'une des suites du Rosenkavalier de Strauss et la cinquième Symphonie de Mahler. La pièce du Canadien Brian Current fut retirée sans explication. Celle-ci vint plus tard, de la part de la direction : la partition fait appel à un piano et on ne parvint pas à faire entrer le gros instrument parmi les 90 musiciens entassés dans le sanctuaire de la Basilique.

Le programme se ramenait donc à deux produits assez semblables du lourd répertoire germanique post-romantique pour très gros orchestre. Déjà très exigeantes pour un orchestre professionnel, les deux partitions, forcément, le sont encore plus pour un orchestre d'étudiants. Comme la veille, à l'Académie Orford, s'ajoutait l'obligation pour ces pauvres enfants, comme pour leur chef d'ailleurs, de se produire dans la chaleur insupportable d'une église que les lampions ne contribuaient certes pas à rafraîchir!

De ce côté-ci de la rampe, les conditions inhumaines rendaient la concentration difficile. Bien des auditeurs s'éventaient avec leurs programmes, d'autres quittaient simplement les lieux. Que les musiciens et leur chef réussirent à traverser ces deux heures de musique sans graves problèmes, qu'ils atteignirent même, à plusieurs moments, le plus haut niveau d'excellence et d'inspiration, cela tient, incontestablement, à un miraculeux amalgame de ces qualités qui font les grands musiciens : passion, précision, rigueur, discipline. Ils méritent notre plus entière admiration.

À l'entracte, on remit le prix de 15 000 $ du Conseil des Arts du Canada à Bénédicte Lauzière, 21 ans, violon-solo de l'orchestre.

Le chef Darlington, dont le nom nous était totalement inconnu, avait la partition devant lui pour chaque oeuvre mais je ne l'ai vu à aucun moment en tourner les pages. De toute évidence, il connaissait bien ses sujets. De la suite de Rosenkavalier qu'il avait choisie (parmi plusieurs qui existent), il tira le maximum d'opulence orchestrale et de charme discret.

Déjà dirigé au National Youth par Jacques Lacombe en 2005, le Mahler reçut une interprétation très satisfaisante, sinon mémorable, et nous valut surtout des solos de trompette et de cor d'une plénitude sonore qu'on ne trouve pas nécessairement tous les soirs chez les orchestres professionnels.

S'adressant au public, le chef rappela que Mahler demande une longue pause après le deuxième mouvement. En fait, il quitta alors le podium pour quelques minutes. Je lui ferai remarquer que Mahler demande aussi d'enchaîner le quatrième mouvement (le célèbre Adagietto popularisé par le cinéma) au cinquième et dernier mouvement. Étrangement, il ignora cette indication et fit un arrêt entre les deux mouvements.

Oubliant la chaleur, il commanda à ses musiciens deux petits rappels... vocaux et non instrumentaux.

NATIONAL YOUTH ORCHESTRA OF CANADA / ORCHESTRE NATIONAL DES JEUNES DU CANADA. Chef invité : Jonathan Darlington. Vendredi soir, Basilique Notre-Dame.

Programme :

Suite de concert de l'opéra Der Rosenkavalier, op. 59 (1945) - Strauss

Symphonie no 5, en do dièse mineur (1901-04) - Mahler