Une soirée de musique classique métissée d'une fête techno urbaine. C'est ce que promettent le maestro Jean-Philippe Tremblay et l'Orchestre de la Francophonie en présentant la Symphonie fantastique de Berlioz à la Société des arts technologiques avec le DJ Marcelo Sanchez et l'artiste visuel Daniel Iregui.

Exit le décorum habituel du classique. DJ symphonique se veut au contraire un concert hors normes en trois temps où l'on pourra bouger et prendre un verre tout en appréciant l'oeuvre du compositeur français.

DJ Sanchez lancera la soirée avec un prélude électronique, un mix techno qu'il a préparé en s'inspirant de l'ambiance et de la structure en cinq mouvements de la symphonie. Puis, à l'heure où le concert moyen a déjà dépassé l'étape du rappel et où le mélomane rentre sagement chez lui - soit vers 23h -, les musiciens de l'orchestre entameront leur performance dans les règles de l'art.

«Le fait de jouer dans un contexte différent ne doit en rien affecter la qualité de l'interprétation, on ne fait aucun compromis là-dessus», explique Jean-Philippe Tremblay, qui contemplait l'idée de travailler avec des artistes de la scène techno depuis un certain temps. La symphonie sera donc offerte dans son intégralité et la musique de Berlioz exécutée note pour note, comme lors d'un concert conventionnel.

«Je suis loin d'être un connaisseur de [musique techno], mais je l'apprécie beaucoup, dit-il. En m'attardant au travail de ces artistes dans les détails, j'ai été impressionné. Le prélude électronique de Marcelo Sanchez sera une musique à écouter avec autant d'attention que celle de Berlioz.»

Le jeune chef souhaitait par ailleurs sortir l'orchestre de son cocon habituel en allant à la rencontre d'un public qui n'est pas nécessairement formé d'habitués. La Fantastique, que l'orchestre vient d'ailleurs d'enregistrer sous étiquette Analekta, s'avère une oeuvre idéale pour tenter une telle expérience, selon lui.

«C'est une pièce à programme (NDLR: musique narrative, basée sur une histoire) qui possède un bagage psychologique sous-jacent très intéressant à développer dans un autre contexte», fait valoir le chef.

L'oeuvre d'Hector Berlioz, révolutionnaire pour son époque, a été composée en partie sous l'influence de l'opium. Elle raconte musicalement, en cinq épisodes allant de la rêverie à une nuit de sabbat cauchemardesque, l'histoire d'un jeune homme amoureux. Un récit de nature autobiographique, puisque le compositeur était alors obsédé par la jeune actrice shakespearienne Harriet Smithson, qui deviendra plus tard son épouse. Au cours des cinq mouvements, une mélodie, appelée l'idée fixe, revient sans cesse, qui représente sa bien-aimée.

Tendance

Les orchestres font de plus en plus appel à des artistes d'autres sphères pour organiser des événements multidisciplinaires et séduire un nouveau public. Londres et New York sont à l'avant-garde à cet égard.

«Ce n'est pas juste de la poudre aux yeux, dit Jean-Philippe Tremblay. On est là pour obtenir quelque chose de cohérent, artistiquement parlant. On est à la recherche de la beauté. Sans vouloir être prétentieux, ce que l'on cherche à créer, c'est davantage une oeuvre d'art qu'une simple ambiance.»

À Montréal, quelques soirées intégrant électronique et classique ont déjà eu lieu. Ce fut le cas, notamment, d'un concert de l'OSM dans un entrepôt de la brasserie Molson pendant le festival Mutek l'an dernier. Toutefois, c'est la première fois qu'une seule oeuvre sert de fil conducteur et de cadre conceptuel à toute une soirée.

Musique pour les yeux

Daniel Iregui, artiste qui se définit comme un designer d'installations interactives, veillera quant à lui à ce que les yeux soient stimulés autant que les oreilles en travaillant à partir d'images, de motifs et de couleurs en constante évolution projetés sur cinq écrans. Sa petite boîte de création, Iregular, a déjà participé, entre autres, à la Nuit blanche 2011 de Montréal en lumière, avec des installations dans le Quartier des spectacles.

«Ce que je fais est plus complexe qu'un travail de vidéojockey, explique-t-il. J'improvise en interaction avec la musique de l'orchestre en modifiant les projections grâce à un écran tactile. Ainsi, le résultat est différent chaque fois.»

Après la symphonie, la fête se poursuivra dans une ambiance techno assurée par d'autres DJ invités.

DJ Symphonique, Orchestre de la Francophonie, mardi, 21h, à la Société des arts technologiques.