Les programmes que monte Boris Brott à l'Orchestre de chambre McGill offrent un peu plus d'intérêt que ceux que nous y servait régulièrement son défunt père Alexander, cela dit avec tout le respect dû au fondateur du petit ensemble.

Hier soir, par exemple, Boris nous offrait une création d'un jeune compositeur d'ici, un quatuor de Beethoven transcrit par Mahler et le brillant Triple Concerto de Beethoven.

Indépendamment du résultat, l'initiative était intéressante et méritait le déplacement.

La pièce nouvelle est signée Maxime Goulet, 30 ans, un ancien élève d'Alan Belkin à l'UdM qui travaille surtout aux États-Unis et se spécialise dans la musique pour jeux vidéo. En début de concert, il a brièvement décrit sa pièce, Toute une journée, dont les quatre mouvements totalisent 13 minutes et représentent à la fois le déroulement d'une journée et celui de toute une vie. Ainsi, le troisième mouvement est un duo pour le violon-solo et le violoncelle-solo qui se veut à la fois soirée en tête-à-tête et symbole d'une vie de couple. Au finale, les musiciens éteignent leurs lutrins et le chef souffle sur la chandelle qui l'éclairait.

La pièce n'offre rien de particulièrement original au plan musical, bien que le duo violon-violoncelle soit assez évocateur.

Du modeste métier, on passe ensuite au génie avec le Quatuor op. 95 de Beethoven, le Serioso, tel qu'adapté pour orchestre à cordes par Mahler en 1899. La préface de la partition, publiée à Londres chez Weinberger, révèle que Mahler fit jouer son arrangement par un orchestre de 68 instruments à cordes. Avec 16 seulement, Brott obtint une lecture acceptable, malgré quelques problèmes de justesse chez les maigres violons.

Dans son adaptation, Mahler ajoute au quatuor une partie de contrebasse qui n'intervient qu'occasionnellement et, en général, double simplement la partie de violoncelle. Bien qu'il respecte le plus souvent la dynamique de Beethoven, Mahler commande un surprenant «pppp» sur la dernière mesure du deuxième mouvement - détail que Brott a ignoré. Par ailleurs, Brott y est allé d'une intéressante initiative personnelle au troisième mouvement en isolant le violon-solo pour une longue intervention, comme dans la version originale.

Coïncidence, sans doute, cette version originale de l'op. 95 figure ce soir même au premier programme de l'intégrale des 17 Quatuors à cordes de Beethoven inscrite au Festival de musique de chambre que dirige Denis Brott, le frère du chef d'orchestre.

De Beethoven encore, le Triple Concerto réunissait hier soir trois solistes associés à McGill (l'université et non l'orchestre de chambre). La pianiste Sara Laimon, le violoniste Mark Fewer et le violoncelliste Matt Haimovitz connurent tous trois quelques problèmes techniques légers et passagers qui ne ralentirent aucunement leur enthousiasme communicatif. Chef et petit orchestre les suivaient plutôt qu'ils ne dialoguaient vraiment avec eux.

ORCHESTRE DE CHAMBRE McGILL. Chef d'orchestre : Boris Brott. Solistes : Sara Laimon, pianiste, Mark Fewer, violoniste, et Matt Haimovitz, violoncelliste. Hier soir, Pollack Hall de l'Université McGill.

Programme :

Toute une journée (2011) (création) - Goulet

Quatuor à cordes no 11, en fa mineur, op. 95 ( Serioso ) (1810) - Beethoven, arr. pour orchestre à cordes : Mahler (1899)

Concerto pour piano, violon, violoncelle et orchestre en do majeur, op. 56 (1804) - Beethoven