Le pianiste américain Gilbert Kalish était le choix de McGill cette saison pour sa «Série des artistes invités». Après une master-class mardi soir, M. Kalish partageait hier soir un programme avec quelques professeurs de la maison dont la pianiste Sara Laimon, l'une de ses anciennes élèves.

Ce spécialiste du contemporain puise son entrée en matière chez Haydn, comme une sorte de retour aux sources. Il n'a malheureusement pas choisi l'une des sonates les plus intéressantes parmi les quelque 60 du compositeur. Les doigts de 75 ans ont encore une très grande agilité, et pourtant, pas tout à fait celle qu'on attend dans cette musique absolument transparente où, comme chez Mozart, tout est à découvert. On observe même un petit côté amateur dans cette lecture, car c'en est une puisque le pianiste joue avec sa partition. Dans chaque mouvement, M. Kalish se limite à la première des deux reprises. On n'en demandera pas davantage.

Il passe ensuite à sa spécialité: une pièce de l'Américano-argentin Mario Davidovsky pour piano et bande datant de 40 ans. Ces sons préenregistrés et leur mélange avec le piano suivent une recette qui n'offre plus rien de nouveau aujourd'hui. Heureusement, cela ne dure que sept minutes.

Le même piano sert ensuite à un exercice à quatre mains. M. Kalish et son ex-élève Laimon ont choisi les rares Variations op. 23 de Brahms sur un thème de Schumann dont l'origine reste fort mystérieuse. L'exécution est précise mais, comme dans le Haydn, l'oeuvre est d'un intérêt limité.

Le meilleur du concert vient après l'entracte: c'est le grand Quintette pour piano et cordes en cinq mouvements de Chostakovitch, un troublant produit de guerre daté de 1940. Les violonistes Fewer et Crow (dans cet ordre et non dans celui du programme), l'altiste McNabney et le violoncelliste Haimovitz entourent M. Kalish pour une exécution qui, sans être toujours irréprochable au plan technique, conjugue ce qu'il y a de lugubre et ce qu'il y a de sardonique dans cette demi-heure bien remplie.

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GILBERT KALISH, pianiste, et ensemble instrumental: Sara Laimon, pianiste, Mark Fewer et Jonathan Crow, violonistes, Douglas McNabney, altiste, et Matt Haimovitz, violoncelliste. Hier soir, Pollack Hall de l'Université McGill.

Programme:

Sonate pour piano no 31, en la bémol majeur, Hob. XVI :46  (c. 1768) - Haydn

Synchronism no 6, pour piano et bande sonore (1970) - Davidovsky

Variations en mi bémol majeur sur un thème de Schumann, pour piano à quatre mains, op. 23 (1861) - Brahms

Quintette pour piano et cordes en sol mineur, op. 57 (1940) - Chostakovitch