La Sinfonia concertante pour violoncelle et orchestre en mi mineur, op. 125, de Prokofiev, est le résultat de plusieurs remaniements que le compositeur apporta à son Concerto pour violoncelle op. 58, de 1938. Rostropovitch seconda son ami Prokofiev dans ce travail et créa le produit fini le 18 février 1952, à Moscou. (Détail historique intéressant: Sviatoslav Richter, le célèbre pianiste, faisait à cette occasion ses débuts de chef d'orchestre - débuts demeurés sans lendemain, comme on sait.)

La très longue oeuvre de quelque 40 minutes fait l'objet de deux nouvelles versions: Gautier Capuçon avec Valery Gergiev et l'Orchestre du Mariinsky de Saint-Pétersbourg, chez Virgin, et Pieter Wispelwey avec Vassily Sinaisky et l'Orchestre Philharmonique de Rotterdam, chez Channel. (Coïncidence, non seulement a-t-on entendu ces deux orchestres ici en début d'année, mais Gergiev, l'ancien chef du Rotterdam, occupe maintenant ce poste à Saint-Pétersbourg.)

Créateur de l'oeuvre, Rostropovitch en reste l'interprète le plus éloquent. On connaît de lui au moins quatre versions de la Sinfonia concertante, la plus électrisante étant un live de 1964 publié chez Russian Disc il y a une quinzaine d'années, disparu depuis, et digne d'une sérieuse recherche.

Rostropovitch apporte tour à tour une énergie sauvage et un abandon total à cette musique née sous ses doigts. Personne ne l'égale ici. Mais le jeune Capuçon se rapproche de cette manière de faire, variant sa couleur instrumentale selon qu'il traverse un épisode rêveur ou humoristique. De même, Gergiev colore l'orchestre avec imagination.

En complément, Capuçon joue les Variations sur un thème rococo de Tchaïkovsky avec une certaine liberté et, en même temps, une rare fidélité aux indications de dynamique.

Le disque de Wispelwey est inutile. Le violoncelliste néerlandais est un musicien racé, mais il n'a pas du tout le mordant que requiert ce Prokofiev; il ne joue d'ailleurs pas toujours parfaitement juste et a même l'air de s'ennuyer.

Wispelwey complète son disque avec deux oeuvres pour violoncelle seul. La Suite «chinoise» en quatre courts mouvements d'Alexander Tcherepnine, de 1946, est une intéressante rareté. De la Sonate de 1955 de George Crumb, il avait signé une version pleinement convaincante chez Globe en 1992. Cette fois, on dirait le simple caprice d'un remake pour sa nouvelle marque.

PROKOFIEV: Sinfonia concertante pour violoncelle et orchestre op. 125:

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GAUTIER CAPUÇON + TCHAÏKOVSKY

VIRGIN, 50999 694486

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PIETER WISPELWEY + TCHEREPNINE, CRUMB

CHANNEL, CCS SA 27909