Le premier concert de la saison au Nouvel Ensemble Moderne avait attiré quelque 300 personnes hier soir, salle Claude-Champagne, et ce, bien que le lieu ne soit pas le plus accessible au monde, surtout par soir de pluie.

Le nom de Iannis Xenakis comme «vedette» de la soirée n'est certes pas étranger à ce succès de public. On avait un peu oublié cet important créateur qui fut à la fois compositeur, mathématicien, architecte et philosophe. Cet hommage, l'idée de la directrice Lorraine Vaillancourt, n'avait pas à attendre le prétexte d'un anniversaire.

L'homme naquit en 1922 et mourut en 2001. Il nous visita à quelques reprises, et ce dès 1967, année où il vint présenter son Polytope lumineux et sonore au Pavilllon de la France à l'Expo.

Les cinq oeuvres de Xenakis au programme englobaient près de 30 ans de création. Or, la plus ancienne, Anaktoria, de 1969 (la première jouée), révélait la même stupéfiante nouveauté dans le son que O-Mega, venu 28 ans plus tard. Il faut bien le reconnaître, les énormes efforts déployés par la majorité des compositeurs actuels - ceux d'ici autant que ceux d'ailleurs - pour «sonner original» font sourire à côté de ce que la géniale imagination de Xenakis a pu produire.

Servie par les virtuoses du NEM et ses invités de l'extérieur, la musique de Xenakis sonnait hier soir avec une force inouïe, parfois poussée à la limite du tolérable : petite clarinette extrêmement stridente et clarinette basse aux caverneuses multiphoniques, évoluant toutes deux au milieu du plus beau fouillis sonore, percussions très sèches en opposition aux dissonances très crues de l'ensemble instrumental, cuivres hurlant à fendre l'air, et quoi encore.

Le programme était simplement trop long. L'entracte de 20 minutes n'allégeait aucunement ces deux heures exigeant le maximum de l'auditeur. On aurait pu nous épargner l'assez quelconque trio à cordes de 10 minutes et, surtout, le cycle chanté de Kurtag, repris d'une annulation la saison dernière. Le quatrième et dernier chant est fort; ce qui précède laisse peu d'impression, tout comme la voix qui défend tout cela.

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NOUVEL ENSEMBLE MODERNE. Dir. Lorraine Vaillancourt. Solistes: Lori Freedman, clarinettiste, Natalia Zagorinskaya, soprano, et Julien Grégoire, percussionniste. Hier soir, salle Claude-Champagne de l'Université de Montréal.

Programme:

Anaktoria, pour huit musiciens (1969) - Iannis Xenakis

Échange
, pour clarinette basse et ensemble (1989) - Iannis Xenakis

Quatre Chants sur des poèmes d'Anna Akhmatova, pour soprano et ensemble, op. 41 (1997-2008) - György Kurtag

Ikhoor, pour trio à cordes (1978) - Iannis Xenakis

O-Mega
, pour percussions et ensemble (1997) - Iannis Xenakis

Thalleïn
(1984) - Iannis Xenakis