Le 33e Festival de Lanaudière se termine par la visite annuelle de l'Orchestre Symphonique de Montréal, qui donne deux concerts à l'Amphithéâtre avec Kent Nagano. Le premier avait lieu hier soir, le second a lieu ce soir.

Rappelons que l'oratorio Die Schöpfung - La Création - de Haydn, avec choeur et trois voix solistes, constitue le programme de ce soir, 20 h. Hier, on entendait le Concerto pour violon de Brahms avec la violoniste allemande Isabelle Faust et la dixième Symphonie de Chostakovitch.

Le Festival prend effectivement fin demain après-midi, 14 h, avec l'ensemble Orford Six Pianos, mais les deux programmes de l'OSM marquent la fin, pour cette année, des grands concerts du soir à l'Amphithéâtre.    

La juxtaposition, dans le même contexte, de Lanaudière et d'Orford, c'est-à-dire de nos deux grands festivals rivaux, ne se limite pas au concert de ce sextuor de pianistes. Il y a plus cocasse encore. Il manque deux jours à la soi-disant «Semaine Kent Nagano et l'OSM» du Centre d'arts Orford, deux jours au cours desquels Nagano et l'OSM ne peuvent être à Orford puisqu'ils sont à Lanaudière! Cette situation passera certes à l'histoire comme le gag de notre été musical 2010.

Moins de 3 000 personnes

Le froid a réduit hier soir à moins de 3 000 personnes un auditoire qui, en temps normal, aurait été beaucoup plus considérable.

L'ordre du programme fut modifié et ramené à ce qu'en toute logique il aurait dû être en premier lieu, c'est-à-dire le Brahms d'abord, ensuite le Chostakovitch donnant toute la vedette à l'OSM.

Isabelle Faust est venue à Lanaudière il y a plusieurs années, alors inconnue. Elle figure aujourd'hui parmi les violonistes les plus réputés au monde. Ses enregistrements découvrent une interprète plutôt froide et j'appréhendais son Brahms. Ce n'est pas encore la grande passion, mais cela reste toujours très musical, rigoureux sans raideur, d'un goût parfait et finalement bien supérieur au Beethoven affecté de Hilary Hahn la semaine dernière.

Brahms indique de jouer une cadence au premier mouvement. Les violonistes choisissent habituellement parmi les cadences de Joachim, de Kreisler et de Milstein. Isabelle Faust a choisi la très rare cadence, avec timbales, de Ferruccio Busoni.

La dixième Symphonie de Chostakovitch est l'une des créations les plus terrifiantes du compositeur soviétique. Elle fut jouée à l'Amphithéâtre en 1996 par l'Australian Youth Orchestra et Nagano la dirigea à l'OSM en 2007. Evgueny Mravinsky et le Philharmonique de Leningrad, qui ont créé l'oeuvre en 1953, en ont signé deux ans après un enregistrement foudroyant où, en fait, l'orchestre ne joue pas mais crie son désespoir.

Le sage Nagano ne retrouve qu'une partie de cette atmosphère. Le suspense qu'il établit dès le début, aux cordes graves et aux bois plaintifs, annonce de grandes choses, mais notre attente reste vaine. La pétarade des percussions et la course à l'abîme des cordes et des vents sont exécutées par un orchestre virtuose, mais le résultat se limite à un exercice de haute voltige. Il y manque la tension, la souffrance, la peur, qui sont l'essence de cette musique absolument troublante.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef d'orchestre : Kent Nagano. Soliste : Isabelle Faust, violoniste. Hier soir, Amphithéâtre Fernand-Lindsay de Joliette. Dans le cadre du 33e Festival de Lanaudière.

Programme :

Concerto pour violon et orchestre en ré majeur, op. 77 (1878) - Brahms

Symphonie no 10, en mi mineur, op. 93 (1953) - Chostakovitch