À la chaleur proprement insupportable qu'il faisait hier encore s'ajoutait un autre problème, celui de l'acoustique excessivement réverbérée des Saints-Anges de Lachine, pour compromettre finalement l'ouverture du Festival de musique de cette municipalité que je situe à une grosse demi-heure et 40 $ de taxi du centre-ville de Montréal.

Les inhumaines conditions atmosphériques expliquent sans doute le public peu nombreux venu à ce concert pourtant gratuit.

Il faut dire aussi que l'encadrement très boiteux dudit Festival n'a rien pour apaiser les esprits. Les organisateurs (un bien grand mot!) ne nous informent à peu près pas de ce qui s'y passe, il faut courir après les renseignements -- et encore, sans succès -- , programmes et solistes sont modifiés sans qu'on n'en soit informé.

Sans parler de ce qui y tient lieu de brochure: un mesquin petit dépliant sans un mot de biographie sur les artistes invités et qui annonce encore l'Orchestre de la Francophonie sous son ancienne appellation, le «canadienne» du nom ayant été éliminé il y a longtemps.

Puisque Lachine ne l'a pas fait, précisons que l'orchestre fondé et dirigé par Jean-Philippe Tremblay comptait hier soir 50 garçons et filles. Ma première observation sur leur prestation concerne l'admirable discipline dont ils ont fait preuve, malgré les conditions adverses. Dans l'église, nous étions littéralement collés à nos bancs. Là-bas, dans le choeur, chef et musiciens fournissaient le même considérable effort physique qu'en temps normal. Quel héroïsme!

La même remarque s'applique à l'organiste Vincent Boucher qui, là-haut, sous les combles, dialoguait avec l'orchestre dans le Concerto de Poulenc. M. Boucher adapta au Casavant symphonique des Saint-Anges les registrations prescrites par l'auteur, se rapprochant ainsi des couleurs souhaitées par celui-ci. Avant tout, il reconstitua parfaitement la multiple personnalité de cette partition tour à tour canaille, tendre et tragique.

On le sait par la série de récitals qui s'y donnent, cet orgue magnifique ne connaît pas de problèmes d'acoustique dans ce lieu qui est le sien. Ce n'est pas le cas de l'orchestre. La synchronisation entre orgue et orchestre était généralement bonne. Par contre, dans les très nombreux passages faisant appel à la pleine puissance orchestrale, la réverbération brouillait les lignes et rendait l'audition pour ainsi dire impossible.

De la deuxième Symphonie de Schumann, il n'est donc resté que le très beau mouvement lent, chanté dans une dynamique modérée par des cordes unifiées et très justes. Les autres mouvements étaient d'autant plus inécoutables que le chef y avait adopté des tempi trop rapides. Jusqu'aux deux Trios du Scherzo qui furent pris à la même imperturbable vitesse, sans une once de rubato...

Rien de particulier à dire sur l'ouverture de Genoveva, sauf que ce choix était assez original.

Pour connaître vraiment la «cuvée» 2010 de la Francophonie, il faudra attendre ses deux concerts à Pollack le mois prochain.

ORCHESTRE DE LA FRANCOPHONIE. Chef d'orchestre: Jean-Philippe Tremblay. Soliste: Vincent Boucher, organiste. Hier soir, Église des Saints-Anges, de Lachine. Dans le cadre du Festival de musique de Lachine.

Programme:

Ouverture de l'opéra Genoveva, op. 81 (1847-50) - Schumann

Concerto pour orgue, orchestre à cordes et timbales (1938) - Poulenc

Symphonie no 2, en do majeur, op. 61 (1845-46) - Schumann