Le jury du Concours international de violon a fait connaître son choix des trois principaux gagnants avant même que je n'aie le temps d'écrire une ligne sur la deuxième et dernière séance de la finale, hier soir.

Comme on le sait déjà, ces trois gagnants sont l'Américain Benjamin Beilman, à 20 ans le plus jeune des six finalistes (premier prix), l'Allemand Korbinian Altenberger (deuxième prix) et le Russe Nikita Borisoglebsky (troisième prix). Rappelons aussi que le reste du palmarès sera dévoilé au concert des lauréats demain soir, 19 h 30, salle Wilfrid-Pelletier.

Bien que je continue de penser que Borisoglebsky était digne du premier prix, le choix de Beilman me paraît tout à fait juste. Offrir, à 20 ans, une exécution aussi solide techniquement et, surtout, une interprétation aussi intérieure du grand et difficile Concerto de Sibelius est un accomplissement exceptionnel. Il est évident que le jury a tenu compte ici du jeune âge du concurrent.

L'Allemand Altenberger, entendu hier soir dans le premier Concerto de Chostakovitch, vient en deuxième place. Choix logique ici aussi. Après un début de prestation hésitant où il était pourtant bien appuyé par les vents «noirs» de l'orchestre (tuba et contrebasson), il s'est ressaisi et a conduit le concerto à une conclusion électrisante. Mais il a grincé à quelques reprises et a la mauvaise habitude de taper du pied en jouant.

Deux autres finalistes l'encadraient hier soir. La Japonaise Kyoko Yonemoto, toute de blanc vêtue, avait choisi le premier Concerto de Paganini. Cette musique est faite presque exclusivement de traits de virtuosité dont certains sont plutôt ridicules; le reste se ramène à quelques thèmes accrocheurs. Cette virtuosité, la concurrente la possède, mais jusqu'à un certain point seulement; elle a joué faux ici et là, elle ne fait pas vraiment chanter son violon et ignore certaines indications de Paganini, par exemple «con passione» trois fois de suite à la fin du mouvement lent.

Dernier entendu, l'Américain Noah Bendix-Balgley. Comme deux autres finalistes, il a choisi le Concerto de Brahms. Ces trois Brahms nous auront valu autant de cadences différentes au premier mouvement. Borisoglebsky avait choisi celle de Fritz Kreisler, Jaeyoung Kim, celle de Joseph Joachim, et hier soir, Bendix-Balglay nous arrivait avec celle, très rare, de Nathan Milstein.

Deux mots résument, je pense, ce dernier finaliste: racé et terne. En détaillant un peu plus, je signalerais son aigu incisif et, en même temps, une légère tendance à jouer faux.

 

CONCOURS MUSICAL INTERNATIONAL DE MONTRÉAL. Discipline: violon. Épreuve finale, avec l'Orchestre Métropolitain, dir. Jean-Philippe Tremblay. Salle Maisonneuve de la Place des Arts. Deuxième séance hier soir.

Programme:

Kyoko Yonemoto, 25 ans (Japon): Concerto no 1, en ré majeur, op. 6 (1817) - Paganini

Korbinian Altenberger, 28 ans (Allemagne): Concerto no 1, en la mineur, op. 77 (1955) - Chostakovitch

Noah Bendix-Balgley, 25 ans (États-Unis): Concerto en ré majeur, op. 77 (1878) - Brahms