Il n'y a pas si longtemps, cela s'appelait tout simplement Orchestre-réseau et groupait, à la fin de chaque année académique, les meilleurs sujets des sept institutions du Conservatoire du Québec en un grand orchestre, le temps d'une tournée de plusieurs villes et d'un enregistrement du programme présenté.

Cette année, ce qui, pour moi, est encore l'Orchestre-réseau se présente sous le nom de L'Envolée symphonique 2010, qui ne correspond à rien du tout, et s'accompagne d'un «spectacle» de poésie mêlé à la musique, comme si les trois oeuvres au programme ne se suffisaient pas à elles-mêmes.Le programme, donné une première fois hier soir à l'église Saint-Jean-Baptiste, avait attiré quelque 800 personnes malgré un calendrier musical de plusieurs autres événements. Il est repris ce soir à Val-d'Or et dimanche à Québec.

Quelle qu'en soit l'appellation, l'orchestre réunit cette année 95 élèves des sept institutions. Avant le concert, le directeur général Nicolas Desjardins les fait lever, par ordre de ville.

Raffi Armenian, directeur du Conservatoire de musique de Montréal et chef de l'orchestre de l'établissement, partage la première moitié du programme entre La Mer de Debussy et Fleuves de Gilles Tremblay.

L'église historique de la rue Rachel, même avec 800 personnes dans la nef, reste un lieu réverbéré et ne sonne pas comme une salle de concert. Le Debussy s'y écoute pourtant bien, surtout qu'Armenian anime la partition d'une sorte d'irrésistible mouvement houleux.

Dans le cadre de l'«hommage» à Gilles Tremblay, Armenian reprend Fleuves, cette oeuvre spectaculaire que l'OSM avait commandée au compositeur pour exécution ici et en tournée (Carnegie Hall et Europe) en 1976, mais dont la création fut reportée à l'année suivante et confiée à un chef capable de l'assumer.

L'acoustique de SJB, ici encore, nous prive de bien des détails, mais l'ensemble impressionne. La partition est difficile pour tous - chef, exécutants et auditeurs - et passe encore bien.

Présent, le compositeur adressa quelques mots au public. Parlant de la menace qui pèse sur un certain orgue local prestigieux, il s'est simplement trompé d'église, ce qui n'est pourtant pas dans ses habitudes.

Bien qu'il ait très honorablement servi le Debussy et le Tremblay, Raffi Armenian se retrouvait vraiment dans son élément après l'entracte avec Mahler et Das Lied von der Erde. De cet orchestre pourtant sans réelle expérience, ce Viennois d'adoption et de formation a obtenu non seulement une lecture techniquement très au point, individuellement et collectivement, mais encore et surtout une vraie sonorité mahlérienne, avec les phrasés et les timbres conformes à la partition.

Peu à dire sur les deux solistes. Les dérapages sûrement involontaires du ténor pouvaient passer pour de l'interprétation puisque le texte ici est finalement celui d'un homme ivre. Ce ténor remplaçant Marc Hervieux s'appelle J. Patrick Raftery. L'autre soliste, Annamaria Popescu, chanta presque toujours un peu faux et presque toujours sans expression.

Quant aux 20 jeunes comédiens engagés dans l'affaire, leur présence était bien inutile. Leur talent n'est nullement en cause. On leur a simplement mis dans la bouche des textes ayant peu à voir avec les oeuvres entendues et, pis encore, des textes qu'ils disaient parfois en même temps et qui se perdaient dans la réverbération du lieu.

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ORCHESTRE DU CONSERVATOIRE DE MUSIQUE DU QUÉBEC. Chef d'orchestre: Raffi Armenian. Solistes: J. Patrick Raftery, ténor, et Annamaria Popescu, mezzo-soprano. Avec le concours de comédiens du Conservatoire d'art dramatique du Québec. Hier soir, église Saint-Jean-Baptiste. Reprise ce soir, 19 h 30, Théâtre Télébec, Val-d'Or, et dimanche, 19 h 30, Palais Montcalm, Québec.

Programme:

La Mer (1903-05) - Debussy

Fleuves (1976) - Tremblay

Das Lied von der Erde, avec ténor et mezzo-soprano solos (1908) - Mahler