Porter une robe de princesse et danser avec un prince charmant, c'est le rêve de beaucoup de petites filles qui ont aimé Cendrillon. Mais pour Julie Boulianne, qui tiendra ce soir le rôle-titre à l'Opéra de Montréal, la marraine fée, en plus de changer une citrouille en carosse, veille aussi sur la carrière d'une jeune chanteuse qui prend son envol sur la scène internationale.

En nomination cette année aux Grammy Awards pour son enregistrement de Shéhérazade dans L'Enfant et les sortilèges de Ravel, Julie Boulianne enchaîne les rôles depuis quelques années. On l'a entendue dans Il Barbiere di Siviglia à Montréal en 2008. Elle a aussi interprété Cendrillon à l'Opéra de Marseille en janvier, Lazuli dans L'Étoile de Chabrier au New York City Opera en mars, et Cherubino dans Le Nozze di Figaro de Mozart en avril à Vancouver.

 

Et c'est loin d'être terminé pour la mezzo-soprano: l'an prochain, elle fera ses débuts au Metropolitan Opera. Elle chantera dans deux productions aux côtés des plus grands: Plácido Domingo, Angela Gheorghiu et Susan Graham, notamment. Elle tiendra le rôle de Stéphano dans Roméo et Juliette, de Gounod, et celui de Diane dans Iphigénie en Tauride de Gluck, que l'on pourra voir ici grâce à la série diffusée en direct dans les cinémas. Un conte de fées?

«J'apprécie vraiment tout ce qui m'arrive depuis quelque temps, car cela va au-delà de mes espérances, dit-elle. Je voulais vivre de mon art et chanter le plus souvent possible, mais je ne m'étais pas donné comme objectif d'aller dans telle ou telle grande maison d'opéra.»

Mais il a fallu plus que de la magie pour en arriver là: c'est avant tout le fruit de beaucoup de travail. Après quelques années sur la scène professionnelle, cette diplômée de McGill a tenu à se perfectionner en étudiant pendant deux ans au Juilliard Opera Center de New York.

«Je travaillais, mais je sentais que je n'étais pas aussi à l'aise que je pouvais l'être et je me suis dit que j'avais besoin d'apprendre encore pour que ma voix soit capable de mieux traduire les idées musicales que j'avais en tête, dit-elle. J'avais besoin de me raffiner. Le fait d'aller à Juilliard a changé ma vie.»

À propos de Cendrillon

«C'est un rôle très délicat à aborder car Cendrillon est un personnage que tout le monde connaît, explique la chanteuse. Il est facile de tomber dans les clichés. Le plus difficile est de garder le personnage simple et de trouver un équilibre pour que les émotions traversent la salle, sans en faire trop.»

Pour elle, l'histoire de Cendrillon représente un passage entre l'adolescence et l'âge adulte, alors qu'elle découvre qui elle est vraiment. «Psychologiquement, elle est plus complexe que dans le conte original ou dans la version de Walt Disney, dit-elle. On touche plus à la douleur intérieure et à l'injustice. La mise en scène met l'accent sur le voyage émotionnel du personnage.»

Sur le plan vocal, le rôle aussi comporte des défis: «Il demande un grand registre, avec des passages très aigus ou très graves, dit-elle. Le défi est de garder une voix égale et de ne pas me perdre dans ces extrêmes.»

Le tout se joue dans le cadre d'une production extrêmement colorée dont l'action est transposée dans les États-Unis des années 50, ce qui donne lieu à des décors et à des costumes excentriques que La Presse a pu entrevoir cette semaine. Sans vouloir en révéler les surprises, on peut dire que le public doit s'attendre à un spectacle empreint d'humour et de folie.

Cendrillon, Opéra de Montréal, salle Wilfrid Pelletier de la PdA, 20h, du 22 mai au 3 juin.