N'eût été le hasard, Sondra Radvanovsky et Dmitri Hvorovtosky n'auraient peut-être jamais eu l'occasion de chanter ensemble. Les voilà pourtant en tournée! Ils s'arrêtent à Montréal le temps d'un concert où Verdi sera à l'honneur, vendredi prochain.

Le duo s'est rencontré il y a deux ans sur la scène du Conservatoire de Moscou pour l'enregistrement d'un disque d'airs de Verdi qui sortira fin avril. À l'origine, c'est la soprano roumaine Angela Gheorghiu qui devait accompagner le réputé baryton russe, mais elle s'est décommandée au dernier moment. Sondra Radvanovsky, soprano née aux États-Unis, a été appelée en renfort. Ce fut le début d'une belle amitié et de nombreuses collaborations.

Dire que les deux chanteurs partagent une grande complicité sur scène comme dans la vie pourrait sembler cliché. Mais un fait survenu juste avant l'entrevue réalisée avec la chanteuse cette semaine le confirme.

Au fond du bar désert de l'hôtel où ils ont donné rendez-vous à La Presse, on entend la voix d'un crooner entamer un air de jazz. Le baryton aux allures de rock star lance aussitôt un «shall we dance» à la chanteuse, d'un ton coquin. Les voilà qui font semblant de danser un slow! On ne doutera plus de leur complicité... ni de leur humour!

La chimie qui circule entre eux se transmet aussi vocalement. «Nous avons tous les deux des voix verdiennes et des voix slaves, dotées d'une couleur sombre et qui se mélangent très bien», dit Sondra Radvanovsky. Selon la soprano lirico spinto, une voix slave est une qualité qui vient de naissance, et qu'elle a la chance de posséder.

«C'est une voix nordique, dit-elle, comme celle qu'avait, par exemple, la soprano suédoise Birgit Nilsson. Elle permet de rendre les mélodies de façon plus riche et plus pleine.»

Une voix qui convient parfaitement au répertoire de Verdi, sa spécialité. Depuis une dizaine d'années, la soprano a chanté des rôles verdiens sur les plus grandes scènes du monde, notamment celui de Leonora dans Il trovatore, au Metropolitan Opera. Elle reprendra d'ailleurs ce rôle en avril 2011 au Met. Cette fois, le monde entier pourra la voir, puisque la production sera diffusée en direct et en haute définition dans les cinémas. Son collègue, Dmitri Hvorostovsky, qui connaît également une carrière phénoménale, sera de la même production, dans le rôle du comte de Luna.

Aïda à Toronto

D'ici là, ils seront tous deux très occupés. La soprano tiendra notamment le rôle titre dans Aïda à Toronto l'automne prochain, et son disque d'airs de Verdi, sur étiquette Delos, sera en vente ce printemps.

«J'aime beaucoup chanter les héroïnes verdiennes, dit la soprano. Ce sont des femmes vraies, qui ont un but et vont quelque part. Elles n'attendent pas passivement, et sont prêtes à mourir par amour.» Mourir sur scène? Elle adore! «Ma mère dit toujours que je meurs si bien», ajoute-t-elle en riant.

Pour cette tournée de quatre concerts, en plus de Montréal, le duo visite Toronto, Washington et New York, au Carnegie Hall. La première partie du programme est entièrement consacrée à Verdi, avec des airs tirés d'Ernani, de Simon Boccanegra, de La Forza del Destino et d'Aïda. Il sera accompagné par l'Orchestre de la Francophonie, dirigé par Constantine Orbelian et par le Québécois Jean-Philippe Tremblay pour la portion orchestrale du concert, dont le programme comporte quelques préludes et ouvertures. En seconde partie, on entendra Dvorak, Rossini, Puccini et Tchaïkovsky.

Il ne fait pas de doute, selon la chanteuse, que le public montréalais ira à la rencontre de deux représentants de la nouvelle génération de chanteurs d'opéra. «Une génération qui participe à la nouvelle ère du chant, dit-elle. Aujourd'hui, à l'ère du visuel, de la téléréalité et de l'opéra diffusé en haute définition, en plus de bien chanter et de bien jouer, les chanteurs doivent prendre soin de leur apparence, surveiller leur poids, faire de l'exercice et, en plus, il faut que tout cela ait l'air facile! Nous n'avons pas peur de prendre des risques sur scène et nous voulons montrer que l'opéra peut être quelque chose d'amusant et d'excitant.»

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Dmitri Hvorostovsky, Sandra Radvanovsky et l'Orchestre de la Francophonie, le 26 mars, 20 h, à la salle Wilfrid-Pelletier.