Le Quatuor Molinari présentait hier après-midi, au Conservatoire où il est maintenant «en résidence», le traditionnel concert des oeuvres primées à son Concours de composition, lequel en était à sa quatrième année. Le jury, réunissant les membres du Molinari et les compositeurs Ana Sokolovic et Brian Cherney, avait analysé sous pseudonyme 92 partitions inédites provenant de 32 pays.

Les trois prix en argent furent décernés respectivement à Snezana Nesic, de Serbie (3000 $), David Philip Hefti, de Suisse (2000 $), et DaeSeob Han, de Corée du Sud (1000 $). Une mention d'honneur est allée à Zhenzhen Zhang, de Chine.

Selon la formule établie, les oeuvres primées étaient jouées à rebours. On entendit donc l'oeuvre de la Chinoise en premier et celle de la Serbe en dernier. Dans leurs notes d'accompagnement, les auteurs indiquent où ils ont puisé l'«inspiration» pour ces travaux. Pour la Chinoise, c'est l'eau (comme l'indique son titre), pour le Coréen, les toiles de Molinari (comme par hasard), et ainsi de suite.

Je n'ai observé aucun lien véritable entre ces repères et le produit sonore. Une fois de plus, l'écoute abstraite se révélait la seule valable.

La Chinoise nous avertit : «Cette oeuvre est à l'avant-garde de l'écriture pour quatuor.» Pardon, madame, mais il ne faut pas avoir entendu beaucoup de musique contemporaine pour affirmer pareille chose. Le travail s'ouvre ici sur un long solo de violon suivi d'un long duo violon-violoncelle. Les autres emboîtent graduellement le pas et le tout se ramène à 13 minutes d'habile sous-Bartok.

Le Coréen montre plus d'imagination : ses quatre parties instrumentales sont généralement très contrastantes et ses 12 minutes de musique font bien alterner force et subtilité.

Le Suisse joue sur les sons petits et très petits et sur les effets instrumentaux comme les «sul ponticello». Vers la fin, il introduit un fort élément rythmique qui pourrait marquer le début d'une vraie musique. Mais il s'arrête au bout de 12 minutes.

La Serbe fait piétiner son quatuor pendant 14 minutes autour de petits sons, toujours les mêmes, provoquant une sorte de léthargie dans le mince auditoire. Ma voisine s'était endormie et j'ai failli en faire autant. La Serbe parvient cependant à créer une certaine unité au sein de ce fouillis, voire à transcender la matière sonore dans le sens d'une cérébralité qui a dû plaire au jury.

_____________________________________________________________________________________________________

QUATUOR À CORDES MOLINARI - Olga Ranzenhofer et Frédéric Bednarz (violons), Marcin Swoboda (alto) et Pierre-Alain Bouvrette (violoncelle). Hier après-midi, Conservatoire de musique et d'art dramatique. Programme: oeuvres gagnantes du 4e Concours de composition H2O - Zhenzhen Zhang (Chine) Bi-serial, light-sound - DaeSeob Han (Corée du Sud) In(ter)ventions - David Philip Hefti (Suisse) Running Thoughts - Snezana Nesic (Serbie)