Yannick Nézet-Séguin a été nommé chef de l'Orchestre Philharmonique de Rotterdam en septembre 2008, il n'y a donc qu'un peu plus d'un an, et déjà se complique la discographie du jeune chef et de cette formation qu'il fut invité à diriger dès octobre 2005.

Une première parution YNS-Rotterdam, sous l'étiquette-maison de l'orchestre, groupe l'Eroica de Beethoven et Tod und Verklärung de Strauss enregistrés en concert en novembre 2007, mais n'est pas disponible en Amérique, du moins pour l'instant.

Récemment paraissait chez Virgin, maison parente de la prestigieuse EMI, le premier disque réalisé par Nézet-Séguin avec son orchestre depuis sa nomination là-bas: de juillet dernier, un couplage des concertos pour violon de Beethoven et de Korngold, avec Renaud Capuçon comme soliste. (J'ai commenté ce disque dans ces pages le 28 novembre.)

Maintenant, la grande marque elle-même, EMI, publie un disque Ravel de Nézet-Séguin avec Rotterdam datant de juin 2007, soit plus d'un an avant sa nomination. Le monde du disque offre souvent de telles étrangetés: on enregistre un chef avant même qu'il ne soit élu et on sort le disque plus d'un an après sa nomination.

On peut également s'étonner que la musique de Ravel, musique française s'il en est, soit confiée à un orchestre néerlandais et à un jeune chef québécois. Peu importe, à vrai dire: le résultat est pleinement convaincant.

Le programme, totalisant un peu plus d'une heure, comprend deux sommets de la production orchestrale de Ravel, soit la deuxième suite du ballet Daphnis et Chloé (celle des deux suites qu'on joue le plus souvent) et le poème chorégraphique La Valse, ainsi que ses propres orchestrations de pièces qu'il écrivit d'abord pour le piano: les huit brèves Valses nobles et sentimentales et cinq mouvements tirés du petit ballet Ma mmère l'oye.

Tel que pris en mains par Nézet-Séguin, le second orchestre des Pays-Bas conjugue précisément ce que requiert Ravel, soit autant de raffinement et de souplesse que de solide et brillante virtuosité. Résultat: des interprétations en tous points comparables aux meilleures de la discographie.

Pour les trois mouvements de Daphnis et Chloé: un Lever du jour baigné de lumière, une Pantomime miraculeusement dansée par les flûtes, une Danse générale absolument frénétique. Pour La valse: la pulsation, la transparence, les frémissements, les rallentandos accrocheurs qui en font un pur chef-d'oeuvre.

En total contraste: tout ce qu'on peut souhaiter de délicatesse et de discrètes couleurs pour les Valses nobles et sentimentales et Ma mère l'oye. N. B.: dans ce dernier cas, les titres ne sont pas donnés dans le bon ordre.

RAVEL

Orchestre Philharmonique de Rotterdam

Dir. Yannick Nézet-Séguin

EMI, 9 663 422

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