Des différentes versions du Messie de Handel montées à Montréal chaque année à cette période-ci, celle de l'Orchestre de chambre McGill est toujours la première - ce dont la direction fait chaque fois grand état. Par exception cette année, elle vient en dernier, après au moins trois autres.

Le plus étonnant, c'est que l'intérêt du public n'a aucunement baissé après trois auditions différentes. Lundi soir, la Cathédrale anglicane, qui peut recevoir 700 personnes, était comble; on a même refusé du monde à la porte.

Il s'agissait d'une présentation modeste: 17 musiciens à l'orchestre et 62 choristes, entassés dans le choeur, sans autre éclairage que celui du lieu, cependant que les solistes montaient en chaire (!) pour leurs interventions, deux d'entre eux s'y trouvant bien à l'étroit pour un certain duo.

Boris Brott nous donna la partition presque intégralement - 46 numéros sur 53 - et dirigea une exécution de bonne routine, sans style particulier mais sans gaucheries. Son petit orchestre joua très correctement et le choeur se défendit honorablement. On nota quelques décalages entre les deux ensembles: rien de dramatique.

Des quatre solistes, la palme va au jeune baryton Alexander Dobson pour le style vocal et le caractère qu'il apporta aux récitatifs et solos destinés à une voix de basse. Plus expressif que David Daniels dans la récente présentation de Labadie, le haute-contre Daniel Taylor projeta une bonne voix mais ornementa parfois abusivement. Nathalie Paulin était en 2002 la soprano du Messie de l'OSM. J'avais alors écrit: «(Elle) exécute brillamment les mélismes de «Rejoice greatly» et chante juste, mais sans le moindre caractère.» Les mêmes mots s'appliquent à ce que j'ai entendu lundi soir. Voici une chanteuse qui n'a nullement progressé. Benjamin Butterfield, lui, a régressé et cherche dans une expression factice à pallier un ténor qui a perdu son agilité et sa couleur.

L'auditoire a longuement ovationné et s'est non seulement levé (suivant la tradition) pour le fameux «Hallelujah!» mais l'a chanté avec le choeur.

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«MESSIAH», oratorio en trois parties, texte anglais de Charles Jennens d'après la Bible, musique de George Frideric Handel (1742). Édition Watkins Shaw (Novello, 1958).

Orchestre de chambre McGill et Choeur de la Christ Church Cathedral (dir. Patrick Wedd). Solistes: Nathalie Paulin, soprano, Daniel Taylor, haute-contre, Benjamin Butterfield, ténor, et Alexander Dobson, baryton. Direction: Boris Brott.

Christ Church Cathedral, lundi soir.