L'Orchestre de l'Université de Montréal ouvrait sa 16e saison samedi soir sous la direction d'un chef invité, Paolo Bellomia, professeur de direction d'orchestre à l'UdM et l'un des chefs qui remplaceront le titulaire Jean-François Rivest actuellement en année sabbatique (et néanmoins présent au concert samedi).

Rivest impose habituellement à ses troupes des programmes difficiles et formateurs et Bellomia en a fait autant samedi, à la différence qu'il a amené les 93 étudiants vers un répertoire négligé par le titulaire, celui de Debussy, dont trois oeuvres, y compris le triptyque Iberia et La Mer, occupaient la plus grande partie du programme.

 

La formation que nous entendions là était égale à toutes celles qui se sont succédé sur cette scène depuis 1993, c'est-à-dire d'un niveau quasi professionnel, avec une vraie sonorité d'orchestre, une justesse absolue et des sections toutes solides (oublions les inévitables petites bavures des cors!) entre lesquelles le chef, dirigeant sans baguette, maintenait coordination et équilibre.

Formé à la musique contemporaine, Bellomia fait un Debussy plus proche de la rigueur de Boulez que de la frénésie de Munch, par exemple, un Debussy où l'on admirait d'abord la virtuosité de l'orchestre et de ses composantes, son habileté à créer des couleurs et certains solos importants comme celui de la trompette.

De même, l'orchestre eut beaucoup de mérite à défendre l'oeuvre nouvelle, en quarts de ton, de Pascal Berger, élève d'Isabelle Panneton. Six minutes d'un fourmillement que je réécouterais volontiers.

Avant l'entracte, Roland Arnassalon, violoniste français de 31 ans et élève d'Anne Robert, a joué le périlleux Concerto de Brahms. Le fait d'être encore aux études passé 30 ans laisse songeur. Pourtant bien secondé par Bellomia, le nouveau venu ne s'est extériorisé que dans la cadence (il avait choisi celle de Joachim). Mais il reste un violoniste de talent, malgré quelques brefs écarts de justesse et un léger trou de mémoire au finale.

Serhiy Salov

Autre exemple d'études prolongées empiétant sur une carrière bien amorcée: Serhiy Salov, premier prix au Concours de Montréal de 2004, qui, à 30 ans, étudie à l'UdM avec Jean Saulnier. Son récital d'hier après-midi confirma ses qualités les plus évidentes, qui sont celles d'un virtuose. À cet égard, son Pétrouchka de fin de programme fut assez spectaculaire. Le pianiste ukrainien joua six mouvements, sans indiquer de qui était cette transcription qu'il ne faut pas confondre avec celle, en trois mouvements, que Stravinsky destina à Rubinstein.

En début de programme: un Bach très austère découvrant un Fazioli remis à neuf mais encore un peu dur, trop brillant à l'aigu, voire légèrement faux par endroits, une Humoreske de Schumann débridée, comme il se doit, et les trois Intermezzi op. 117 de Brahms habités d'une belle pensée.

Les Violons du Roy

Entracte forcé vendredi soir à Pollack. Peu après le début du concert de 25e anniversaire des Violons du Roy, les pompiers envahirent la salle et, le temps de le dire, tous, auditeurs et musiciens, instruments en mains, se retrouvaient sur le trottoir. Fausse alarme, m'a informé un pompier.

Rentrant en scène une demi-heure plus tard muni d'un extincteur (!), Bernard Labadie reprit le concert et annonça qu'il écourtait légèrement le programme, consacré au Handel italien, et qu'il omettait l'entracte.

Augmentés de quelques vents, les Violons jouèrent un concerto grosso et une suite de l'opéra Rodrigo et accompagnèrent le haute-contre allemand Andreas Scholl et la soprano québécoise Hélène Guilmette, montrant partout leur habituelle excellence: parfaite synchronisation des coups d'archet, justesse et beauté du son, vitalité rythmique, le tout donnant une image parfaite de cette musique avant tout décorative.

Excellence est aussi le mot qui convient aux deux chanteurs. On regrette simplement que cet absolu dans la technique et le plaisir à chanter servent des sujets aussi superficiels.

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ORCHESTRE DE L'UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL. Chef invité: Paolo Bellomia. Samedi soir, salle Claude-Champagne de l'UdM. SERHIY SALOV, pianiste. Hier après-midi, Chapelle historique du Bon-Pasteur. LES VIOLONS DU ROY. Chef d'orchestre: Bernard Labadie. Vendredi soir, Pollack Hall de l'Université McGill.