Les deux oeuvres qui dominaient mardi soir le programme de l'OSM - la Symphonie dite du Nouveau Monde de Dvorak et le Concerto pour violon de Sibelius - comptent parmi les plus fréquemment jouées et enregistrées du répertoire. Elles étaient cette fois entre les mains d'un chef et d'une violoniste qui, bien que tous deux en début de carrière, en ont donné des interprétations fort honorables.

Mais voyons d'abord les 15 premières minutes du concert: une pièce de Michael Colgrass (natif de Chicago, vivant à Toronto) intitulée As Quiet As... L'idée ici est de recréer le bruit (!) produit par une feuille d'arbre changeant de couleur, par une fourmi marchant sur le sol, etc. Nous sommes évidemment très près du silence et l'effet est plutôt réussi. On s'explique moins bien les échos intermittents de Beethoven et de jazz et le vacarme qui termine la pièce.

Karen Gomyo, 27 ans, paraît ensuite pour le Sibelius. L'oeuvre est d'une effarante difficulté technique et la jeune violoniste n'y éprouve pas de réel problème. Au premier mouvement, le saut tant redouté de trois octaves qui lance la deuxième cadence est réalisé avec aplomb; au finale, les rapides traits en doubles cordes sont joués presque à la perfection.

J'ai quand même quelques réserves. S'écartant de la partition, la violoniste ralentit ici et là le discours, histoire, sans doute, de «faire profond». Résultat: le chef invité Andrew Grams a de la difficulté à la suivre et fait jouer l'orchestre deux fois plus fort qu'il ne faut. Le public nouveau de la série «Air Canada» applaudit après chaque mouvement et la soliste fait chaque fois un petit salut.

L'après-entracte de 45 minutes appartient au chef invité. L'introduction Adagio de la Nouveau Monde est prise à une lenteur abusive: Molto Adagio, davantage même. Le premier mouvement proprement dit, Allegro molto, démarre à un tempo plus juste, mais l'interprétation s'annonce routinière et on remercie le chef d'omettre la longue reprise de 16 pages.

Ce qui suit est cependant plus inspiré. Du Largo très senti se détachent les trémolos des cordes et, surtout, l'irrésistible mélodie du cor-anglais de Pierre-Vincent Plante. Au Scherzo, le chef invité commande au timbalier Andrei Malashenko des accents d'une force inhabituelle: on dirait des coups de feu! Quelques autres idées encore, au finale, révèlent un chef qui, finalement, a quelque chose à dire.

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ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL. Chef invité: Andrew Grams. Soliste: Karen Gomyo, violoniste. Mardi soir, salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Série «Air Canada». Programme: As Quiet As... (1966) Colgrass; Concerto pour violon et orchestre en ré mineur, op. 47 (1903-05) Sibelius; Symphonie no 9, en mi mineur, op. 95, B. 178 («du Nouveau Monde») (1893) Dvorak.