Ayant connu bien des changements d'effectifs et bien des hauts et des bas en 40 ans d'existence, le Quatuor Tokyo semble avoir atteint sa vitesse de croisière ces dernières années et donnait hier un neuvième et remarquable concert au LMMC.

Les noms des compositeurs annonçaient un programme plutôt conventionnel, mais au moins deux surprises nous attendaient. Le concert s'ouvrit sur un Schubert totalement inconnu, un quatuor que je ne me rappelle absolument pas avoir entendu (sauf, peut-être, au disque), et qui offre d'intéressantes idées harmoniques et autres, par exemple ces petites phrases staccato et pianissimo du premier-violon qui ouvrent le Presto final et que le Canadien Martin Beaver fit si bien ressortir.

 

De Mendelssohn - sans doute pour le bicentenaire -, le Tokyo avait également choisi un quatuor rarement entendu, op. 44 no 1. Il s'agit d'une autre oeuvre très longue, comme le Schubert, et le Tokyo a bien fait de nous épargner dans chaque cas la reprise au premier mouvement. Mais, alors que le Schubert offre densité et originalité, le Mendelssohn est complètement dépourvu de l'une et de l'autre. Voici une musique facile, superficielle et quelque peu insignifiante qui nous fait souhaiter une remise en question de la production de cet enfant gâté.

Entre ces deux classiques, le Tokyo glissait le sixième et dernier Quatuor de Bartok. L'une des formations précédentes du Tokyo, celle de 1974 où les archets étaient tous japonais, avait joué l'oeuvre à Pro Musica. L'exécution d'hier nous valut, de la part de chaque musicien et des quatre coéquipiers, une autre minutieuse demi-heure de travail sur les sonorités. Mais il y a davantage dans cette musique: l'écho de la guerre, le désespoir même. Le Tokyo en a fait abstraction pour sauter à un rappel - un bref Haydn - après avoir salué une seule fois.

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QUATUOR À CORDES TOKYO - Martin Beaver et Kikuei Ikeda (violons), Kazuhide Isomura (alto) et Clive Greensmith (violoncelle). Hier après-midi, Pollack Hall de l'Université McGill. Présentation: Ladies' Morning Musical Club. Programme: Quatuor no 8, en si bémol majeur, op. 168, D. 112 (1814) - Schubert Quatuor no 6, Sz. 114 (1939) - Bartok Quatuor no 3, en ré majeur, op. 44 no 1 (1838) - Mendelssohn