Isabelle Demers jouait dimanche pour la troisième année consécutive dans la série estivale d'orgue de la basilique Notre-Dame, invitée cette fois à donner le récital de clôture à la place du titulaire Pierre Grandmaison. Celui-ci doit prendre un repos de deux mois pendant lequel Mme Demers le remplacera à la console. La jeune organiste de 27 ans a d'ailleurs quitté le poste qu'elle occupait dans une église du Connecticut et revient à Montréal tout en poursuivant son doctorat à Juilliard avec Paul Jacobs.

La forte impression laissée par ses deux précédents passages à Notre-Dame lui avait valu un auditoire de quelque 250 personnes, ce qui est considérable pour un récital d'orgue un dimanche de chaleur extrême.

On l'a de nouveau constaté, Bach reste encore la façon la plus convaincante d'ouvrir un programme d'orgue. Mme Demers avait choisi le colossal Prélude et Fugue en mi bémol BWV 552, intercalant quelques pièces entre les deux volets, comme c'est l'usage. Le Prélude est l'un des très rares exemples où Bach indique des dynamiques - ici, quatre «piano» et quatre «forte», que l'organiste souligna d'une façon un peu fantaisiste. Étrange aussi, son tempo très lent pour la Fugue. Ce Bach n'en demeura pas moins grandiose parce que riche de ces anches de Notre-Dame suggérant un orgue baroque, alors que les timbres chauds d'un Psalm-Prelude du Britannique Herbert Howells illustraient cet orgue romantique qu'est aussi le Casavant de la place d'Armes.

Comme à ses deux précédents récitals, Isabelle Demers avait programmé du Reger, cette fois l'Introduction et Passacaille op. 63 nos 5 et 6, qu'elle fit suivre de la Chaconne et Fugue op. 31 no 3 de la Montréalaise Rachel Laurin. Une registration de jeux isolés et de mélanges contrastants souligna les similitudes entre les deux formes, passacaille et chaconne, et entre les thèmes utilisés par les deux compositeurs à un siècle d'intervalle.

Fin de programme tumultueux avec Dieu parmi nous, dernière des neuf pièces de cette Nativité du Seigneur d'un Messiaen qui n'a pas encore 30 ans. Ici, rien d'une gentille prière. Plutôt, une gigantesque toccata qui «éclate comme la foudre». La description, de Messiaen lui-même, s'applique tout à fait à la réalisation de la délicate organiste.

Ovationnée par l'auditoire debout, elle revint à Bach pour son rappel: Fugue en ré majeur, BWV 532.

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ISABELLE DEMERS, organiste. Dimanche soir, Basilique Notre-Dame (orgue à traction électropneumatique Casavant (1890-1991); 92 jeux, quatre claviers manuels et pédale).