Le Festival de Salzbourg, la plus grande manifestation mondiale au carrefour de l'opéra, du théâtre et de la musique classique, ouvrira samedi sa 89e édition dans un contexte de crise économique, mais aussi de fragilité liée à la valse de ses directeurs.

Jusqu'au 30 août, l'intendant et directeur artistique Jürgen Flimm assumera son troisième festival, qui sera déjà son antépénultième puisque le metteur en scène allemand quittera Salzbourg à l'issue de l'édition 2011 pour s'installer au Staatsoper de Berlin, qu'il conseille depuis janvier.

Flimm, auquel succèdera un Autrichien expérimenté venu de l'Opéra de Zurich (Suisse), Alexander Pereira, ne sera donc resté que cinq ans dans la ville de Wolfgang Amadeus Mozart, un mandat aussi court que celui, en demi-teinte, de son prédécesseur et compatriote Peter Ruzicka.

Précédemment, le Belge Gérard Mortier avait provoqué autant que stimulé le public salzbourgeois durant dix ans, tandis que l'enfant du pays Herbert von Karajan a régné 34 ans au pied du Mönchsberg, une montagne locale, jusqu'à sa disparition il y a presque exactement deux décennies (16 juillet 1989).

2011 marquera un grand remaniement puisque le départ de Flimm s'accompagnera de celui du responsable des concerts, l'Autrichien Markus Hinterhäuser, tandis que le directeur pour le théâtre, l'Allemand Thomas Oberender, arrivera au terme de son contrat, qu'il a failli rompre dès cette année.

Face à cette série de départs, la présidente du festival, Helga Rabl-Stadler, ancienne députée conservatrice autrichienne et forte personnalité, incarne depuis 1995 un pôle de stabilité dont la manifestation aura besoin pour affronter d'éventuelles conséquences de la crise mondiale.

Les ressources de billetterie sont cruciales pour ce festival relativement peu subventionné - les fonds publics représentent un peu plus de 25 % du budget total proche de 50 millions d'euros - et pratiquant des tarifs élevés (jusqu'à 370 euros la place).

Or, les ventes de billets enregistrées en fin de semaine dernière étaient en baisse de 5 % par rapport à 2008, selon la direction commerciale, qui a même noté une chute de 11 % pour les achats par les entreprises.

«On ressent la crise, mais pas trop», a nuancé le responsable marketing, Gerbert Schwaighofer, qui veut croire que ce festival est «une entreprise stable» pouvant atteindre une nouvelle fois 90 % de fréquentation et 200 000 spectateurs cet été.

La manifestation n'a d'ailleurs pas renoncé à toute prise de risques artistiques. Creusant comme chaque année une thématique («le jeu des puissants» en 2009), Jürgen Flimm mettra en scène une rareté de Gioacchini Rossini, Moïse et Pharaon, pour laquelle le maestro italien Riccardo Muti descendra de nouveau dans la fosse de l'Orchestre philharmonique de Vienne.

Le festival fera aussi entrer à son répertoire l'oratorio Theodora de Geor Friedrich Haendel, dans une régie de l'Allemand Christof Loy.

Salzbourg honorera en outre l'un des plus grands compositeurs italiens du XXe siècle, Luigi Nono, avec une nouvelle production, confiée au metteur en scène britannique Katie Mitchell, de son oeuvre Au grand soleil d'amour chargé.

Le chef israélo-argentin Daniel Barenboïm reviendra à Salzbourg avec les musiciens proche-orientaux de son West-Eastern Divan Orchestra pour un Fidelio de Luswig van Beethoven, quoique donné en simple version de concert.

L'Allemand Claus Guth, lui, reprendra ses Noces de Figaro ensorcelantes de 2006 et présentera un nouveau Cosi fan tutte. Il bouclera ainsi sa trilogie Mozart-Da Ponte.