Marc-André Hamelin est au centre de quatre concerts que présentera Pro Musica du 9 au 16 mars, salle Maisonneuve: musique de chambre avec le Quatuor Leipzig et la violoniste Lara St. John, récital de mélodies avec Karina Gauvin, programme de concertos avec les Violons du Roy et récital où il sera seul en scène.

Hyperion, la marque britannique pour laquelle il enregistre, a publié au cours des derniers mois trois disques de lui où figurent certaines des pièces inscrites à son récital du 16 mars.

 

Le dernier paru est consacré à Chopin. Hamelin joue les deux grandes Sonates opp. 35 et 58, les deux Nocturnes op. 27, la Berceuse et la Barcarolle. Hamelin a enregistré très peu de Chopin: une Sonate op. 35 de 1994, sous l'obscure marque Port-Royal, est à peu près tout ce qu'on possède de lui en ce qui concerne le compositeur polonais. Loin d'encombrer une discographie Chopin déjà énorme, son disque y apporte une fraîche éloquence.

Hamelin fait toujours servir ses prodigieux moyens techniques à des fins expressives, et ce jusque dans ses plus spectaculaires Alkan, et c'est encore le cas ici. L'extraordinaire puissance de son jeu, où la clarté n'est jamais sacrifiée, nous vaut une Sonate op. 35 d'un rare dramatisme et les plans sonores qu'il établit dans la célèbre Marche funèbre (le troisième mouvement) suggèrent un cortège qui s'éloigne. Au premier mouvement, il fait la reprise après la brève introduction marquée «grave», ce qui est plus logique que de répéter l'introduction, comme le font certains pianistes.

 

En contraste, l'op. 58 est chanté avec une infinie douceur. Le temps semble suspendu dans le dialogue des deux mains du Largo (le troisième mouvement), l'une des plus belles pages de toute la production de Chopin.

Une grande poésie habite les quatre autres pièces, malgré un jeu parfois un peu dur dans les Nocturnes.

Le disque de jazz m'a fasciné, moi qui n'aime pas tellement le genre. Hamelin joue cette musique avec un plaisir immense et contagieux, une virtuosité, une finesse et un humour qui rappellent le légendaire Art Tatum. Il a d'ailleurs choisi des pièces substantielles. La deuxième Sonate de Kapoustine est une vraie sonate, en quatre mouvements. Même chose pour le Prélude et Fugue du pianiste Friedrich Gulda. Et les pièces du pianiste Alexis Weissenberg sont celles d'un vrai musicien.

J'ai trouvé moins captivant le disque de transcriptions de Godowsky, dont plus de la moitié est constituée de «métamorphoses symphoniques» sur Die Fledermaus et deux valses de Johann Strauss fils. Mais il existe beaucoup d'adeptes de cet exercice qui consiste à multiplier les acrobaties pianistiques de toutes sortes autour de thèmes familiers. Ceux-là seront comblés car Hamelin est passé maître en la matière.

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MARC-ANDRÉ HAMELIN

PIANISTE. TROIS DISQUES SOUS ÉTIQUETTE HYPERION

CHOPIN

CDA67 706

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IN A STATE OF JAZZ

CDA67 656

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GODOWSKY

CDA67 626

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