C'est une image très déformée du Macbeth de Verdi que propose l'Opéra de Montréal. Toute l'action se déroule dans un unique décor, légèrement modifié au besoin, et constitué d'un semblant de forêt, à gauche. On suppose qu'il s'agit de la fameuse forêt de Birnam et on se dit que le metteur en scène René Richard Cyr va trouver le moyen de la faire bouger, conformément à la prédiction des sorcières. Attente vaine. Les soldats chargés de vaincre le tyran s'amènent avec de petites branches qui, réunies, feraient tout au plus une décoration de salon.

On cherche le château de Macbeth : il faut se contenter d'une espèce de panneau à moitié dessiné. Et comme il n'y a pas de château, la scène du banquet, présidé par M. et Mme Macbeth, se déroule, comme le reste, en pleine forêt, comme un pique-nique. Des figurants y traînent deux longues tables jonchées de bouteilles transparentes. De loin, on dirait un pique-nique au Naya.

 

Quant aux sorcières qui prédisent à Macbeth qu'il sera roi, elles sont représentées par une bande de punks auxquelles se mêlent quelques garçons. Vulgaires? Ce n'est même pas le mot. Suivant une mode très répandue, cet opéra qui se passe pourtant au XIe siècle est en costumes modernes. On y voit, par exemple, des femmes portant des sacs à main et des coiffures style 1940. À un autre moment, Macbeth entre sa chemise dans son pantalon, sous les yeux de 2800 spectateurs.

Pénible. Et tout cela fait l'objet d'une coproduction de l'OdM avec Opera Australia, qui verra cette merveille en 2011.

L'ambition qui dévore Lady Macbeth et l'emprise qu'elle exerce sur son mari sont traduites à moitié. Michele Capalbo fait d'abord entendre une voix qui détonne et qui plafonne, mais on sait que Verdi lui-même souhaitait une voix laide pour sa Lady. Vers la fin du spectacle, Mme Capalbo projette une voix plutôt belle et termine sur un parfait fil di voce. De cette distribution entièrement canadienne se détachent principalement John Fanning en Macbeth et Brian McIntosh en Banquo. Deux voix graves et viriles, avec un jeu à l'avenant. Fanning est même assez convaincant dans ses moments de remords.

Les choeurs sont assez bons, malgré des faiblesses de direction chez les hommes et chez les femmes. Le chef invité se contente d'accompagner et l'OSM sonne bien, sans plus.

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MACBETH, opéra en quatre actes, livret de Francesco Maria Piave et Andrea Maffei d'après la tragédie de William Shakespeare, musique de Giuseppe Verdi (1847). Production: Opéra de Montréal. Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Première samedi soir. Autres représentations: les 4, 7, 9 et 12 février, 20h. Avec surtitres français et anglais.

Distribution: Macbeth, général dans l'armée du roi Duncan, d'Écosse : John Fanning, baryton Lady Macbeth, sa femme: Michele Capalbo, soprano Banquo, autre général, compagnon de Macbeth: Brian McIntosh, basse Macduff, noble écossais: Roger Honeywell, ténor Malcolm, fils du roi Duncan: Luc Robert, ténor La Suivante de Lady Macbeth: Lara Ciekiewicz, soprano Le Médecin: Alexandre Sylvestre, basse.

Mise en scène: René Richard Cyr Décors: Claude Goyette Costumes: François St-Aubin Éclairages: Étienne Boucher Choeur de l'Opéra de Montréal (dir. Claude Webster) et Orchestre Symphonique de Montréal. Direction musicale: Stephen Lord.