Plusieurs fois en entrevue, Dave Chose a dit avoir pleuré. Le chanteur a versé des larmes à un récent match de l'Impact quand la foule a applaudi le but d'un joueur échangé récemment par Montréal au Los Angeles FC, le Belge Laurent Ciman. Il a pleuré en studio, notamment quand Alex McMahon a reproduit au piano la mélodie qu'il avait en tête pour sa chanson Pizza congelée.

Sensible, l'auteur-compositeur-interprète qui vient de lancer son premier album éprouve beaucoup d'empathie à l'égard des gens. Il voit des choses que les autres ne voient pas, si bien qu'il peut écrire des pièces magnifiques sur ses cigarettes et sa «peur de chauffer», et en tirer de grandes métaphores de la vie.

Sa chanson Le grand départ est inspirée d'un «beau magané» qu'il a croisé en allant acheter des clopes au dépanneur. C'était sa première journée et le patron le traitait avec mépris. «Cela m'est rentré dedans. Je me suis demandé comment il s'était rendu là, raconte Dave Chose. Dans le fond, j'ai peur de savoir où je vais me ramasser plus tard.»

L'avenir donne le vertige à Dave Chose. «Il y a quelque chose de réconfortant dans les plans, mais je n'aime pas cela, dit-il. Des plans de voyage, je ne suis pas capable de faire cela.»

Blocage scénique

Dave Chose, né Dave Bilodeau à L'Ascension-de-Notre-Seigneur, au Lac-Saint-Jean, joue avec les mots depuis longtemps. Au début de l'adolescence, il écrivait de la «fan fiction» en entremêlant les univers de jeux vidéo. «Au secondaire, j'écoutais du prog de mauvais goût et du métal. C'est gênant, j'ai vu Dream Theater deux fois en show», raconte-t-il en riant.

Des amis qui voyaient déjà son talent d'auteur-compositeur-interprète l'incitaient fortement à monter sur scène... en vain. C'était impensable pour lui de se produire devant une foule. «Je n'étais vraiment pas capable.»

Il y a cinq ans, jamais il n'aurait pu même concevoir de se produire en solo comme il l'a fait dimanche au festival Santa Teresa.

«Criss, non... non non non non, lance-t-il, en se replongeant dans le passé avec angoisse. Jamais. C'est sûr que non.»

Vaincre ses peurs

Dave Chose a déménagé du Lac-Saint-Jean à Montréal en 2011 pour poursuivre des études universitaires en cinéma et en littérature comparée. C'est au sein du groupe au cadre «lousse» Faudrait Faire la Vaisselle qu'il a vaincu ses peurs.

Faudrait Faire la Vaisselle donnait dans le «garroché», voire l'autosabotage parfaitement assumé.

«J'avais un blocage, car je prenais la scène beaucoup trop au sérieux. Tu peux prendre au sérieux ce que tu fais sans trop te prendre au sérieux en tant que personne. D'effacer un peu d'ego, ça fait du bien et ça enlève du stress...»

Entre-temps, Dave Chose a découvert Frank et le Cosmos, «un artiste méconnu du Saguenay qui fait de l'ostie de bonne musique». Révélation: «Ça se peut, de chanter comme je parle, chanter dans mon français.»

Si bien qu'un jour, Dave Chose s'est retrouvé avec des chansons folk-grunge qu'il voulait arranger plus sérieusement. Son nouveau coloc, Jonathan Bigras -  «qui est une pièce importante de mon casse-tête» - l'a entendu gratter des chansons dans sa chambre.

Les deux colocataires ont décidé d'aller «travailler des tounes» au studio Latraque. C'était en avril 2016. Nicolas Beaudoin et Benoît Bouchard se sont joints au duo pour l'épauler à la réalisation. Des musiciens de renom sont passés en studio, dont Julien Sagot, Louis-Philippe Gingras, Dany Placard et Alex McMahon. C'était à l'improviste, comme l'aime Dave Chose.

«Nous n'avons pas fait de préproduction, souligne-t-il. En studio, on ne savait jamais comment la chanson allait être à la fin de la journée. C'était insécurisant, mais thrillant.»

Dave Chose a besoin d'être entouré... et rassuré.

«Quand j'ai fini une toune, j'ai toujours l'impression que ce n'est pas bon, jusqu'à ce que quelqu'un me dise que c'est bon.»

«J'oscille entre les grands moments de confiance et les moments où je trouve que je fais de la marde, confie-t-il. Je suis plein de gratitude pour ce qui m'arrive, mais je trouve que c'est un concours de circonstances capoté.»

Dave Chose aurait-il tendance à trop penser? «Non, c'est important de penser.»