L'album Dust de Laurel Halo a été sur toutes les listes de fin d'année en 2017. Et pour cause : arrangements somptueux, épisodes exploratoires substantiels, jeu singulier de styles, mélodies vocales consonantes caractérisent son approche unique sur le territoire de l'électro. Entrevue avec l'artiste américaine établie à Berlin, qui s'arrête à Montréal ce soir.

Il y a trois chapitres importants dans votre progression musicale en tant que compositrice et productrice. Pouvez-vous décrire brièvement les qualités de Quarantine, Chance of Rain et Dust?

L'album Quarantine était axé sur l'idée d'un manque d'espace ou d'oxygène dans la vie. Chance of Rain s'est échafaudé autour de la rupture des patterns. Dust évoque un sentiment de légèreté et d'éphémère.

Sur l'album Dust, vous utilisez votre voix et incluez plus de références R&B, au hip-hop ou même à l'avant-jazz. Avez-vous écouté principalement ces styles durant le processus de création?

Récemment, j'ai écouté plus d'albums «classiques»: NAS (hip-hop), Missy Elliott (hip-hop), Marilyn Manson (rock), Dorothy Ashby (harpe jazz), Jah Shaka (dub)... En fait, je m'applique à écouter plus d'albums, à lire plus de livres, à mieux me soigner. Cela dit, je ne pense pas que l'on puisse assimiler directement mes goûts à ma production musicale.

Vous semblez vous approcher de la forme chanson sur l'album Dust. Est-ce seulement pour ce projet, ou comptez-vous poursuivre cette démarche?

J'aime aussi travailler avec les mots, c'est ce que je peux dire à ce stade. Et je ne suis pas sûre de poursuivre cette démarche qui pourrait être davantage associée à la forme chanson. Ma personnalité n'est pas adaptée à la tâche d'une chanteuse ou encore à celle d'un personnage qui chante. Je suis beaucoup plus heureuse quand je fais DJ, car mon corps et ma personne ne sont pas tant un point focal dans la communication musicale. Peut-être y a-t-il d'autres moyens de marier le texte aux rythmes et aux sons...

La musique instrumentale est très présente dans Dust. Comment avez-vous travaillé avec ce matériel? Échantillons préenregistrés et traités? Séances d'enregistrement avec des musiciens?

J'ai travaillé avec Eli Keszler [batterie, darbouka, etc.], et j'ai utilisé des enregistrements en ligne et j'ai échantillonné son jeu. J'ai fait de même avec Craig Clouse du groupe Shit and Shine [Wurlitzer], Max D [percussion], Julia Holter [violoncelle], Michael Beharie [guitare], Diamond Terrifier [saxophone], Michael Salu, Klein et Lafawndah [voix]. Sur scène, il m'arrive souvent de jouer avec Eli Keszler - percussionniste, compositeur.

Pourriez-vous décrire brièvement votre équipement?

J'ai un home studio avec quelques machines, ainsi qu'un clavier de scène Kurzweil. J'ai aussi accès à un plus grand studio à Prenzlauer Berg [quartier de Berlin], qui dispose d'un éventail plus vaste d'instruments vintage. En somme, j'exploite un mélange d'instruments, d'équipements informatiques et de logiciels.

Comment ont évolué vos sets devant public?

Pendant un certain temps, ils ont évolué vers ce qui me semblait fonctionnel, c'est-à-dire qu'ils présentaient des musiques appropriées au contexte d'un club. Depuis l'année dernière, je présente des variantes de Dust, ce qui est le contraire du fonctionnel ou du «club friendly». Mon travail se concentre actuellement sur l'impact physique du son dans une pièce. Que je sois dans une salle de concert ou dans un club, je veux que ma proposition soit engageante pour l'auditeur: rythmiquement, harmoniquement, physiquement.

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Au Centre Phi ce soir, à 21 h, précédée de Pelada.