Alors que son ancien groupe Vampire Weekend pourrait presque remplir le Centre Bell, Rostam Batmanglij donnait un spectacle dans l'intimité de la Sala Rossa, hier soir. Vous savez quoi? Il en est ravi. Rostam a sorti en septembre dernier un premier album solo, Half Light, et il a collaboré avec des stars pop (Charli XCX, Frank Ocean, Carly Rae Jepsen, Haim, Solange). Il demeure près de Vampire Weekend, notamment à titre de réalisateur, mais il préfère ne pas trop en parler. Nous l'avons rencontré en fin d'après-midi, hier, dans la loge de la Sala Rossa.

A-t-il fallu apprivoiser la scène en solo?

Cela fait un bout que je développe mes prestations scéniques. On m'a demandé à l'été 2016 d'assurer des premières parties pour Brian Wilson. J'ai ensuite commencé à intégrer du visuel.

C'était une grande décision de quitter Vampire Weekend, du moins en tournée?

Beaucoup de gens veulent que je parle de ma carrière, des décisions que j'ai prises et pourquoi. Ma carrière parle d'elle-même. [...] Je suis heureux où je suis. Je me sens bien sur scène. Je suis content de collaborer avec un paquet d'artistes.

Justement, pourquoi les Charli XCX, Frank Ocean, Carly Rae Jepsen, Haim et Solange veulent-ils travailler avec vous?

J'aime penser que c'est parce que cela m'importe beaucoup. Que ce soit pour tous les gens qui entrent dans mon studio, pour quand je fais de la musique pour Vampire Weekend ou pour moi, je crois qu'un réalisateur a de grandes responsabilités. Il faut que je croie en tout ce qui sort de mon studio. Je dois faire en sorte d'en arriver à la meilleure version d'une chanson.

Vous êtes le fils de parents iraniens et vous avez grandi à Washington. Musiques classique et du monde, pop et rock, vos influences sont multiples. La musique avait-elle une place importante dans votre vie familiale?

Oui. De la musique de partout dans le monde. De la musique persane. Du jazz... Je me souviens d'un album d'Ella Fitzgerald de reprises d'Irving Berlin. Il y avait toujours de la musique dans la cuisine... J'ai des souvenirs de Paul Simon et de la bande originale du film Big Night (composée de chansons italiennes).

Parlez-nous des origines de votre chanson Wood.

À la base, le titre était Bollywood. Je voulais faire ma propre version d'une chanson de Bollywood. J'ai finalement scindé l'enregistrement en deux pour y intégrer des paroles et un solo d'une guitare à 12 cordes à partir d'un mode persan majeur, Rast Panjgah. C'est la première chanson que j'ai mise sur SoundCloud en 2011.

Vous avez dévoilé il y a quelques jours le clip de Bike Dream. Un clip tourné à Paris où vous faites du vélo en libre-service. C'est une chanson qui donne des ailes. Est-elle significative pour vous?

Je trouve que cette chanson capte le sentiment d'être libre, mais aussi l'excitation d'un amour imminent. Je savais que je voulais tourner le clip à vélo. Nous avions une journée de tournage possible à Paris, mais le tournage s'est fait de façon clandestine, sans permis. Nous avons loué une voiture familiale pour que le caméraman soit posté dans le coffre avec la porte ouverte à l'arrière. Nous avons improvisé en roulant à partir du Marais.

Vous parlez de l'attirance entre deux garçons dans cette chanson. Est-ce que le fait de révéler votre homosexualité a fait de vous un auteur-compositeur plus libéré?

La chanson de Vampire Weekend Diplomat's Song y faisait référence... C'est important pour moi en tant qu'artiste gai de faire des chansons qui ne sont pas ambiguës. Il y a une pression de faire des chansons universelles. Je peux comprendre, mais moi, je veux que les chansons aient une résonance personnelle, mais des émotions universelles.

Pourquoi avoir déménagé de New York à Los Angeles?

Depuis six ans, beaucoup de musiciens que je connais déménagent de New York à Los Angeles. New York n'a rien fait pour protéger du capitalisme les artistes et les salles de spectacle. [...] Même une salle comme le Zebulon a déménagé à Los Angeles. Mon ami de Francis and The Lights a même écrit une chanson sur le sujet intitulée My City's Gone (sur laquelle figure Kanye West). J'ai contribué à quelques phrases.

Vos projets à court et moyen termes?

La tournée se poursuit. Je veux sortir de la nouvelle musique rapidement, dont une chanson, Inner River, que je vais interpréter ce soir. Les spectacles ont changé ma façon de voir le songwriting. Quand tu es témoin en spectacle de la communion des gens avec ta musique, cela change ta perspective.

Photo André Pichette, La Presse

Rostam