Près de quinze ans après les succès synth rock Mr. Brightside et Somebody Told Me, cinq ans après leur quatrième album, Battle Born, The Killers ont lancé vendredi Wonderful Wonderful, chapitre plus sombre dans la discographie du quatuor de Las Vegas. La Presse s'est entretenue avec le chanteur du groupe, Brandon Flowers, quelques jours avant cette sortie attendue.

Une question de fierté

Au fil des 10 chansons de Wonderful Wonderful, Brandon Flowers s'exprime sur ses regrets professionnels, l'hypocrisie de certains hommes en position d'autorité, ses incertitudes en tant que père, sa perte d'inspiration et autres questionnements existentiels.

«Le monde va vite, mais j'essaie de me soucier des choses qui sont importantes pour moi», dit-il en entrevue. Ainsi, Wonderful Wonderful n'est pas précisément merveilleux merveilleux. Il n'est pas négatif ou cynique non plus. Il est honnête et sincère. «J'ai très hâte que les gens l'entendent. Je suis un peu anxieux, mais dans l'ensemble, j'en suis fier», confie l'artiste de 36 ans. Celui-ci raconte que le producteur québécois Daniel Lanois, qui a travaillé avec The Killers sur Battle Born, a souvent insisté sur l'importance de la fierté alors qu'il était en studio avec le groupe. «Il en parlait passionnément et maintenant, quand on fait une chanson, je me demande: "Est-ce qu'elle me rend fier?"», indique Brandon Flowers.

Gammes mineures, gammes majeures

«Quand nous avons écrit Wonderful Wonderful, puis enregistré la maquette, j'ai éprouvé ce sentiment de fierté. J'ai senti sa puissance et je savais qu'elle avait une certaine force», affirme l'auteur-compositeur-interprète. La pièce titre de l'album est très différente de tout ce que The Killers a fait auparavant. Coproduite par Jacknife Lee (U2, R.E.M.), la chanson qui ouvre l'album propose un rock gothique appuyé par une basse sentie et une guitare distordue.

«Notre bassiste Mark Stoermer et moi avons commencé ensemble le travail sur cette pièce. C'est plus un gars de gammes mineures, alors que je suis plus gammes majeures. Il m'a aidé à passer du côté sombre, explique Brandon Flowers, un sourire dans la voix. Nous avons été inspirés par certains de nos artistes préférés, comme Peter Gabriel, U2 et Jane's Addiction. C'était la chanson titre parfaite.»

Un clip moqueur

Le premier clip de ce cinquième album, The Man, est dans un tout autre registre. Très funky, la pièce permet à Brandon Flowers de jouer les parvenus pendant quatre minutes, une façon de se moquer de son état d'esprit d'il y a quelques années. «C'est comme si je jouais un rôle, quand nous faisons cette chanson, et j'aime beaucoup ça, explique-t-il. Ça me permet de m'échapper un instant.» L'autre vidéo tirée du nouvel album, Run For Cover, a été tournée à Saint-Placide, dans les Basses-Laurentides. «Ce qu'il [le réalisateur Tarik Mikou] a fait avec Arcade Fire est excellent et ça l'intéressait de travailler avec nous. Il avait des idées de lieux de tournage et nous l'avons laissé aller. Le résultat est magnifique», estime le chanteur.

Deux musiciens remplacés en tournée

Lorsqu'on demande à Brandon Flowers pourquoi cinq années se sont écoulées entre les deux derniers albums, il répond simplement que le temps passe vite. «Nous avons tous des projets solos, mais nous ne nous sommes jamais demandé si nous allions faire un autre album. Ça se produit naturellement. Il faut juste se rappeler ce qui nous a motivés au départ, ce qu'on désire accomplir et ensuite, on se lance.» Le leader de The Killers assure que son groupe est une démocratie et qu'il est important que chaque membre soit heureux. La décision du bassiste Mark Stoermer et du guitariste Dave Keuning de ne pas participer à la tournée a donc été respectée par leurs collègues. Ils font toujours partie de la formation, mais sont respectivement remplacés par Jake Blanton et Ted Sablay sur scène.

Personnages de scène

The Killers sont en tournée tout l'automne et seront à la Place Bell de Laval le 6 janvier. «Nous n'avons pas joué dans votre coin autant que nous l'aurions voulu, indique Brandon Flowers. Je me souviens à l'époque de Hot Fuss, en 2004. Nous sommes venus au Club Soda et nous avons eu beaucoup de plaisir.» Comment vont-ils s'assurer d'avoir autant de plaisir cette fois? «Certaines chansons du nouvel album comme The Man permettent de briser le rythme. Quand The Man commence, c'est comme du method acting, je deviens un personnage. Même chose pour The Calling, où je deviens un prédicateur. Je me sens comme Rovert Duvall dans The Apostle ou le jeune [Paul Dano] dans There Will be Blood