Après un passage remarqué au Théâtre Corona en janvier dernier, Alessia Cara sera de retour en ville mardi soir sur la scène du Métropolis. Révélation de l'année au dernier gala des prix Juno, la Torontoise de 20 ans est déterminée à se servir de sa musique pour apporter un peu de «girl power» à une industrie qu'elle juge encore trop sexiste. Entrevue avec l'anti-pop star.

Vous ne la verrez sûrement jamais poser lascivement sur la couverture d'un magazine. Pas plus qu'elle ne se déhanchera en costume à paillettes dans un de ses vidéoclips. Alessia Cara est plutôt du genre à se présenter pas maquillée, en jean, t-shirt et baskets sur le plateau de Jimmy Fallon. La jeune auteure-compositrice-interprète a choisi son camp: celui de l'authenticité, mais aussi de la simplicité.

Une démarche aussi personnelle qu'artistique qui, avoue-t-elle, ne lui aura pas simplifié la tâche pour percer dans l'industrie, mais surtout auprès du public à l'ère de la dictature de l'image.

«J'ai dû faire mes preuves auprès de tout le monde. Les gens avaient une idée préconçue de ce que je pouvais être en raison de mon âge, de mon sexe et de la manière dont je m'habille. Si j'avais été un jeune homme, ce ne serait pas arrivé et ce n'est pas juste», déplore Alessia Cara.

«Je veux commencer à briser tout ça, rappeler aux gens que ce qui compte, c'est ce que je suis et surtout ce que j'ai à dire!», ajoute l'interprète de l'album Know-It-All, qui a notamment été critiquée sur les réseaux sociaux pour sa tenue décontractée lors de sa performance au concert du Nouvel An à Times Square.

«L'industrie de la musique est très sexiste. C'est sûrement beaucoup mieux qu'avant, mais les femmes sont encore défavorisées. On doit faire nos preuves tout le temps. Si on a une opinion différente, on est vite perçue comme une diva.»

«On a besoin de plus de girl power, poursuit la chanteuse. Mais surtout d'être soudées entre femmes dans ce domaine, au lieu de se voir comme des rivales. On doit pouvoir compter les unes sur les autres. Heureusement, il y a des artistes extraordinaires qui le font déjà, comme Rihanna et Beyoncé.»

Un modèle pour les jeunes

De nature introvertie, Alessia Cara a décidé à 13 ans de lancer sa propre chaîne YouTube pour satisfaire son désir de chanter tout en évitant de se produire devant un vrai public.

Un trait de caractère dont elle parle dans Here, son tout premier succès.

«J'ai toujours pensé que je voyais le monde différemment des autres et je me suis souvent sentie isolée. Mon cerveau a toujours fonctionné de cette manière. Beaucoup de jeunes se sentent comme moi et je veux leur dire que c'est correct, que rien ne cloche chez eux. Bien au contraire!», explique la jeune femme qui a pourtant du mal à se considérer comme un modèle pour sa génération.

«Je continue de passer par les mêmes étapes que mon public. C'est un grand poids à porter, mais, en même temps, si j'arrive à aider des gens, c'est bien.»

La chanteuse torontoise a d'ailleurs récemment accepté de prêter sa voix à une campagne contre l'intimidation dont la bande sonore est sa chanson Scars to Your Beautiful.

«Les jeunes sont les plus touchés. C'est important de leur dire qu'ils peuvent être eux-mêmes. C'est difficile de ne pas essayer d'être comme les autres. Je reçois des messages de jeunes femmes et même d'hommes plus âgés qui me disent que ma musique les a aidés. C'est la raison pour laquelle je fais ça et c'est gratifiant», explique la chanteuse.

Tournée

Mardi, Alessia Cara se produira à Montréal pour la deuxième fois en moins d'un an. «J'aime vraiment venir ici. Notre dernier passage en ville était la toute première date de la tournée et, à notre sortie de scène, tout le monde pleurait dans les coulisses, car la foule avait une telle énergie! On ne pouvait rêver d'un plus bel accueil!», se souvient la chanteuse qui a passé tout l'été à assurer la première partie des concerts du groupe Coldplay en Europe.

L'interprète de Wild Things promet à son public montréalais un concert bien différent de celui qu'elle a donné au Théâtre Corona.

«On va avoir des projections graphiques très cool en arrière-plan, de nouveaux éclairages et des arrangements différents pour les chansons de Know-It-All», précise la jeune femme qui interprétera également sa version acoustique de Swim Good de Frank Ocean.

Bien qu'elle ait peu de temps pour écrire de nouvelles chansons pendant sa tournée, Alessia Cara a déjà une bonne idée de ce à quoi ressemblera son prochain album.

«Mon premier opus lançait surtout des messages aux autres. J'aimerais que le deuxième parle plus de moi, des choses de ma vie», conclut-elle.

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Au Métropolis mardi.

photo Jonathan Hayward, archives la presse canadienne

La jeune chanteuse torontoise a été sacrée révélation de l'année à la dernière cérémonie des prix Juno.