Quand on regarde Kevin Bazinet, beau jeune homme à la voix aérienne et au talent de musicien indéniable, on se dit que les fées se sont sûrement penchées sur son berceau. Et que ça continue, puisque le gagnant de la troisième édition de La voix sort ces jours-ci un disque aux accents soul-pop, entouré d'une équipe de feu - Marc Dupré à la direction artistique, Tino Izzo à la réalisation, les Productions J à la machine promotionnelle. Même Céline Dion a collaboré à l'écriture d'une chanson, intitulée Come to Me!

Même s'il est conscient de sa chance - «Ça n'a pas de sens!», lance-t-il en souriant -, le chemin pour y arriver n'a pas été aussi facile qu'il en a l'air. En 2009, alors qu'il avait 18 ans et que sa carrière semblait lancée avec un premier album remarqué, il a craqué sous la pression. L'anxiété aura été sa compagne au cours des années suivantes, jusqu'à ce retour fulgurant à La voix l'hiver dernier.Bref, Kevin Bazinet est bien plus que la nouvelle idole des jeunes filles. Il revient de loin et a pris tous les moyens pour que ça ne se reproduise plus. «Je sais maintenant que je ne suis pas obligé de dire oui à tout, que je dois prendre le temps de cerner ce qui est bon pour moi, ce qui me rendra heureux. J'ai pris trop de choses sur mes épaules et c'est pour ça que ma première carrière n'a pas fonctionné. J'ai juste explosé. Je n'ai pas envie de me rendre là.»

Le monde de la musique est une immense industrie avec de gros enjeux financiers, et il constate avec le recul qu'il n'en avait pas conscience. Fort de cette expérience, il estime avoir gagné en maturité et sait maintenant qu'il ne doit pas brûler d'étapes. 

«Je connais mes limites et je vais y aller une marche à la fois. Oui, mon rêve est d'aller à l'international, mais je ne suis pas comme mon frère Bobby [Bazzini], toujours parti d'un bord et de l'autre. Pour moi, c'est plus dur, je ne suis pas fait comme ça. Je dois être plus prudent.»

Pas question non plus d'être un produit de plus sur le marché. Kevin Bazinet a beau dégager une certaine fragilité, il n'a pas l'intention de se laisser imposer un style ou une image. «Marc était là justement pour s'assurer que je puisse m'exprimer, parce que des fois, c'est difficile de mettre son pied à terre. Il avait confiance en moi, et je l'en remercie.»

Le réalisateur Tino Izzo, qui a travaillé avec de nombreux artistes pop au Québec, a bien compris son style, ajoute-t-il. Et au final, oui, Talk to Me est exactement le disque qu'il voulait. «Les gens trouvent que l'album s'est fait rapidement après La voix, mais ce sont des chansons que j'avais écrites au cours des trois, quatre dernières années et que j'ai eu le temps de travailler. Tino, lui il a clenché, par exemple!»

Allier soul et pop

Ceux qui l'écouteront reconnaîtront le garçon sentimental, humain et profond qu'ils ont découvert à la télé, dit-il. «Ce disque me ressemble complètement. Le côté gospel m'intéresse depuis longtemps, et ce n'est pas quelque chose de si radiophonique. Je voulais intégrer ça, tout en gardant le côté pop.»

On pourrait d'ailleurs le comparer à Sam Smith ou Adele dans ce désir de combiner la soul et la pop. «Oui, c'est vrai. Mais ce qui m'a nourri, quand j'étais adolescent, c'est aussi Gavin DeGraw, James Morrison, Jesse McCartney. Et encore plus jeune, mon père écoutait Billy Ray Cirrus, Elvis Presley, Marvin Gaye... La chanson I Got a Woman de Ray Charles, je l'ai dans la tête au moins une fois par semaine! Ces chansons inspirent toutes encore mon style musical.»

Avec ces références, c'est tout naturellement qu'il s'est tourné vers l'anglais pour écrire - seulement trois des 14 chansons du disque sont en français. Même si certains l'ont réussi - Offenbach, Ben l'oncle Soul, note-t-il -, lui n'a pas trouvé encore comment faire sonner ces tonalités dans sa langue maternelle.

«Je ne chante pas de la même manière dans les deux langues. Les accents toniques ne sont pas les mêmes, c'est comme une habitude que j'ai prise avec l'anglais. Chanter de la soul en français, ce serait comme réapprendre à chanter. Comme si je passais à l'italien demain matin.»

Mais comment pense-t-il se démarquer dans cet océan de pop-rock anglophone? 

«La meilleure façon est de ne pas essayer de se démarquer. Si j'avais trop réfléchi, je n'aurais pas fait ce qui vient du plus profond de mon coeur. J'arrive avec ce que je suis, et je me dis que ce doit être assez unique.»

Heureux sur scène

Kevin Bazinet partira en janvier dans une grande tournée qui le mènera aux quatre coins du Québec. Comment pense-t-il composer avec la fatigue, les nombreux déplacements, la pression? «Ça ne pourra pas être plus dur que l'été dernier, ou je pouvais aller jusqu'à Rimouski pour chanter une toune dans le spectacle de Marc Dupré, et revenir ensuite! À un moment donné, je me suis demandé si j'avais vraiment envie de faire ça dans la vie...»

La réponse a quand même été oui: il est né pour faire de la musique, et les quatre minutes qu'il passait sur scène, il les savourait. «C'est là que je me sens heureux. J'ai vraiment hâte à la tournée: j'aime avoir chaud, triper sur scène, c'est mon métier. Il y aura de tout, des chansons du disque, des covers. J'aimerais faire aussi un show familial comme celui de Marc Dupré, inviter ma mère, mon père, mes frères, même Bobby, s'il est disponible...»

Avec ses chansons qui parlent d'amour, de réussite et d'échecs, d'espoir et de confiance en soi, il espère surtout passer un message positif aux spectateurs. «Ce sera intéressant de sentir que je peux inspirer ou aider des gens.»

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Talk to Me. Kevin Bazinet. Productions J.