La Presse a eu la chance d'écouter le nouvel album de Mumford & Sons et de s'entretenir avec Marcus Mumford, chanteur d'un des groupes les plus populaires de la planète. Surprise : il n'y a aucun banjo ni arrangements folk sur Wilder Mind, qui sort le 4 mai, mais un son pop-rock électrique à la Coldplay et U2. Explications.

À un mois de la sortie du nouvel album de Mumford, on s'affaire à prévenir les fuites. Il faut se rendre dans les bureaux montréalais du distributeur Universal pour écouter quelques nouvelles pièces en vue d'interviewer Marcus Mumford, à qui il nous est interdit de parler de sa vie personnelle (il est marié à l'actrice Carey Mulligan).

« Bonjour, ça va ? », nous lance en français de façon sympathique Marcus Mumford en début d'entrevue.

Histoire d'explorer le potentiel scénique de leurs nouvelles compositions, ses complices et lui se trouvent à Toronto, où ils s'apprêtent à donner un spectacle secret, expérience qu'ils ont tentée quelques jours plus tôt, pour deux soirs, dans une salle intime de Los Angeles.

« C'était bizarre pour la foule et pour nous. C'était la première fois que nous surprenions un public sans avoir des trucs déjà en ligne sur YouTube, par exemple. Nous avons eu la chance de répéter. Le premier soir est allé plus ou moins bien, mais le deuxième, beaucoup mieux. »

Que faire quand un album connaît le succès planétaire de Babel, gagnant du Grammy du meilleur album en 2012 ?

Mumford & Sons a décidé d'aller ailleurs. Malgré des rumeurs de pause et même de séparation, le groupe anglais s'est mis à l'écriture moins de trois mois après la tournée qui a rempli le Centre Bell et mis en liesse la foule du festival Osheaga, en 2013.

« Nous avions besoin d'espace pour écrire sans pression et sans spectacles à l'agenda. Nous étions libres et je crois que cet environnement explique pourquoi les chansons sont différentes, expose Marcus Mumford. Les chansons sont calmes, mais elles sont aussi euphoriques. »

FAIRE TABLE RASE

« Différent » : le mot est juste. Alors que la signature musicale de Mumford & Sons reposait jusqu'ici sur des arrangements folk-pop-trad et une instrumentation acoustique, le groupe a choisi d'habiller ses envolées mélodiques d'un son pop-rock. Winston Marshall a troqué son banjo contre une guitare électrique.

« Nous voulions éviter de nous répéter. Nous avions le sentiment d'avoir fait le tour de l'instrumentation de Sigh No More et Babel. Nous souhaitions quelque chose de frais et d'excitant », dit Marcus Mumford.

Sur la pochette de Wilder Mind, on voit un banc de parc avec vue sur un centre-ville illuminé. Et cette urbanité s'entend.

Mumford & Sons a fait sa retraite d'écriture dans le studio de Brooklyn d'Aaron Dessner, membre de The National, « à coups de semaines ici et là », raconte Marcus Mumford. « Aaron nous a aidés, notamment avec les sonorités de guitares, de claviers et des enchaînements de batterie. Il nous a donné son opinion sur des chansons. C'est bien pour un groupe comme nous de collaborer avec quelqu'un qui a un regard extérieur objectif. »

Le nouveau vernis instrumental des chansons de Mumford & Sons n'en altère pas l'esprit et l'urgence. « Nous avons écrit avec la même mentalité. Pour nous, le changement n'est pas si draconien. Beaucoup de trucs propres à Mumford & Sons sont reconnaissables sur le nouvel album. »

EFFORT COLLECTIF

À l'image du premier extrait, Believe, plusieurs titres débutent sur un tempo lent avec des arrangements minimalistes pour exploser à mi-parcours. On peut imaginer à quel point ils assouviront la soif des foules en spectacle.

Marcus Mumford a davantage partagé l'écriture des textes de Wilder Mind avec les autres membres du groupe que sur les albums précédents. « C'est plaisant de chanter les propos des autres. Comme quand on interprète une reprise, illustre Marcus Mumford. Cela répartit mieux les responsabilités et les rôles. La voix du groupe est plus collective. Chacun de nous quatre est un auteur-compositeur. Je crois que vous allez entendre plus de diversité à l'avenir et une voix partagée. »

Mumford & Sons a fait appel au réalisateur James Ford, qui a travaillé avec Haim et Arctic Monkeys. « Il embrassait avec nous la venue d'un nouveau son. Nous étions au même endroit. »

D'un succès commercial comme celui qu'a connu l'album Babel émane-t-il de la pression ou de la liberté de création ?

« C'est libérateur, répond Marcus Mumford. Comme groupe, nos attentes ont déjà été largement dépassées. Tout le reste est du bonus. On sent que nos fans sont derrière nous, et on a l'intention de faire d'autres albums avec des sonorités différentes. Nos goûts musicaux couvrent un large spectre, de la musique classique au hip-hop. Nous sommes ambitieux sur le plan de la création. »

Selon Marcus Mumford, ce remue-méninges ne changera pas trop le spectacle. « Sinon, nous sommes foutus. »

À quand un spectacle de Mumford & Sons à Montréal ?