Francis Cabrel n'avait pas lancé d'album de chansons originales depuis 2008. Il nous arrive avec In Extremis, un opus qui lui ressemble et où il nous parle d'amour, bien sûr, mais aussi de politique, d'histoire, du temps qui passe et de l'environnement.

«Je suis incapable de changer et les chansons que j'écris ne changent pas, lance-t-il. Le contenu des textes évolue, mais l'enveloppe musicale sera toujours la même: un peu de blues, de rock, de folk et beaucoup de guitare. Ce que je voudrais que l'on en retienne, c'est que c'est l'album de quelqu'un de son âge, qui n'est plus un adolescent, loin de là.»

Parmi ces 12 nouvelles pièces, il n'accorde sa préférence à aucune. «Pour l'instant, je n'en considère aucune comme plus importante, parce qu'elles sont trop récentes. Il faut d'abord que je parte en tournée avec elles. Au bout de quelques mois, je pourrai voir celles qui résistent au temps.»

Quand on a derrière soi toute une carrière et plus de 140 chansons, il devient plus difficile d'écrire, avoue l'auteur-compositeur. D'autant plus qu'il a tendance à écrire lentement.

«J'ai déjà parlé d'une foule de sujets dans mes chansons, dit-il. Les années qui nous séparent de l'album précédent m'ont justement servi à trouver non pas de nouveaux thèmes, mais de nouvelles façons de les aborder.

«Si on voulait résumer toutes mes chansons, dit-il, il n'y a qu'un grand thème, et c'est l'amour, que ce soit entre des personnes ou pour l'humanité. La seule chose qui change, ce sont les façons d'en parler.»

Mandela et Jésus

L'intérêt déjà connu de Cabrel pour l'histoire et ses grands personnages se manifeste encore sur cet album, entre autres avec une chanson comme Azincourt, qui parle de la bataille du même nom survenue en 1415 pendant la guerre de Cent Ans entre la France et l'Angleterre.

«C'est un prétexte de plus pour parler de la folie des hommes. C'est une bataille où il y a vraiment eu des choses affreuses. Les Anglais ont inventé une méthode qui a fait des ravages en tirant des flèches de façon très organisée et meurtrière. C'était comme une nouvelle machine de guerre qui se mettait en route et qui est aujourd'hui poussée à l'extrême. De nos jours, on peut tuer à distance, d'un pays à l'autre. La cruauté de l'homme ne s'arrête jamais.»

Devant la folie humaine, sa position de poète consiste à se tenir à l'écart en répétant les mêmes messages et en espérant qu'ils seront compris, bien qu'il ne se fasse aucune illusion sur sa capacité à changer quoi que ce soit.

Admiratif de ceux qui ont réussi à changer le monde, il a aussi dédié une chanson à Nelson Mandela, Mandela, pendant ce temps, et une autre à Jésus, Dans chaque coeur.

«Pour moi qui ai été élevé dans la tradition chrétienne, depuis le temps que je chante des chansons d'amour, il faut bien reconnaître que le premier qui a parlé d'amour universel, pour toute l'humanité, c'était Jésus. C'est la parole d'amour la plus pure, la plus authentique. Et pour Nelson Mandela, on peut parler aussi de résurrection puisqu'il est passé de 27 ans d'emprisonnement à diriger son pays. Il est passé de la nuit au jour.»

«Je m'intéresse aux personnages qui ont essayé de dispenser autour d'eux de la fraternité et de faire en sorte que les couleurs s'annulent, que les gens s'écoutent et que les peuples s'entendent.»

Est-il satisfait de ce nouveau disque?

«Je ne suis jamais satisfait, dit-il. Je serai satisfait quand je saurai ce que les gens en ont pensé. Moi, j'ai fait ce que j'ai pu et je suis allé au maximum de ce que je pouvais.»

Francis Cabrel sera au Québec en mai pour faire la promotion de ce nouvel album, mais, pour les concerts, il faudra attendre le printemps 2016. Il commencera par une tournée de cinq à six mois en France à l'automne avant de revenir sur le sol québécois.

_____________________________________________________________________________

CHANSON. Francis Cabrel. In Extremis. Chandelle Productions. Sortie mardi.