Un livre d'art et un enregistrement consacrés à l'adaptation de Winterreise, fameux cycle de 24 lieder composés par Franz Schubert sur des poèmes de Wilhem Müller, ont été rendus publics en décembre 2013. Façon Keith Kouna, Le Voyage d'hiver se poursuit au coeur de la saison froide, avec son interprétation théâtralisée sur scène.

Avant-hier, une répétition ouverte aux médias a permis d'imaginer un tant soit peu ce qui se produira pendant exactement une heure et quart, ce soir et demain, à la Cinquième Salle de la Place des Arts.

«Après la sortie de l'album, je suis parti huit mois en France, raconte Keith Kouna. J'ai tourné en formule piano-voix et aussi avec mon groupe. Au même moment, j'étais en contact avec le metteur en scène Antoine Laprise pour développer Le Voyage d'hiver sur scène. Par Skype, on s'est lancé des idées, on a beaucoup trouvé par l'exploration. À mon retour, j'ai plongé dans le spectacle.»

Antoine Laprise lui avait été présenté par René Lussier, à qui l'on doit la réalisation et les arrangements de l'enregistrement. «Il était venu nous rendre visite en studio. On s'était mis à jaser de Schubert et de romantisme allemand. À la suite de cette rencontre, ça allait de soi qu'il ferait la mise en scène», dit Kouna.

Trame narrative

Présent à la répétition, Antoine Laprise résume ce qui se passera devant nous.

« À travers le cycle des 24 chansons, nous essayons de raconter le trajet du narrateur, poète et chanteur. Même s'il a réécrit les textes des lieder, Kouna en a conservé le romantisme brut: l'errance, la perte amoureuse, la dépression... Il faut dire que son récit est un peu plus radical que celui de Müller, conçu au XIXe siècle. Ainsi, nous avons droit à une véritable trame narrative sans que ce ne soit trop précis; il y a de l'espace pour l'interprétation, il y a aussi une symbolique qui permet au spectateur de partir dans son propre truc.

«Sur cette scène inclinée qui nous permet une perspective plus claire, poursuit le metteur en scène, le poète se trouve confiné à une chambre bordée de troncs d'arbres; cet espace est à la fois la chambre et la forêt. Certains éléments y symbolisent l'errance; des bottes d'hiver, par exemple, rappellent les bottes de sept lieues issues des contes popularisés par les frères Grimm, personnages très importants du romantisme allemand. On a répété ce projet pendant à peu près un mois. C'est très ambitieux.»

Quant aux sons émanant de la scène, ils s'annoncent relativement différents de ce que nous offre l'album : «En studio, rappelle Keith Kouna, il y avait 19 musiciens alors qu'il y en a 10 autour de moi. Vincent Gagnon a donc dû modifier des éléments des arrangements originels. Il lui fallait faire avec le nombre de musiciens, tenir compte de l'instrumentation choisie pour le spectacle.»

L'instrumentation déployée autour du chanteur se compose des instruments suivants: piano, claviers, guitares, batterie, percussions, basse, contrebasse, clarinette, clarinette basse, trombone, tuba, violons, alto, violoncelle. Qui plus est, la danseuse Maryse Damecour donne à Kouna une réplique gestuelle.

Rappelons que cette relecture de cette adaptation de Winterreise provient d'une envie de l'artiste punkisant de se mettre au chant lyrique. Le parolier avait entrepris d'écrire en français des versions personnalisées des 24 lieder de Schubert, pour ensuite en attaquer l'interprétation à sa manière.

«Mon chant s'est-il transformé depuis l'an dernier? Oui, je crois être plus à l'aise avec ces pièces que je l'étais lorsque je les ai enregistrées. À force de les interpréter, ça a évolué et... j'ai arrêté la clope. Ces pièces sont exigeantes, je voulais en maximiser le potentiel.»

Quel public sera au rendez-vous?

«Je ne sais pas, répond l'instigateur de cet autre Voyage d'hiver. Seront au rendez-vous les fans qui veulent bien me suivre là où je vais.»



À la Cinquième Salle de la Place des Arts ce soir et demain, 20h30. Le spectacle sera aussi présenté au Grand Théâtre de Québec les 18 et 19 février, 20h, salle Octave-Crémazie.